Page:Revue des Deux Mondes - 1849 - tome 4.djvu/1004

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.

SACS ET PARCHEMINS.

SIXIÈME PARTIE.[1]


Séparateur


XV.


La prophétie de Jolibois s’était accomplie ; la république était proclamée. Les décrets du gouvernement provisoire tombaient dru comme grêle : deux grêlons de cette giboulée atteignirent l’hôtel Levrault, l’abolition des titres et l’abolition de la pairie.

Ce fut pour Gaston un rude coup. Le jeune marquis avait cru s’acquitter envers sa femme en la faisant marquise ; il était maintenant vis-à-vis d’elle dans la position d’un débiteur insolvable en face d’un créancier toujours présent. Sans doute le décret qui abolissait les titres n’avait à ses yeux aucune valeur, il savait bien qu’un trait de plume ne suffit pas à rayer le passé, il avait bien la conscience d’être aujourd’hui ce qu’il était hier ; mais il connaissait la puérile vanité de Laure, et regrettait ce hochet donné en échange de la richesse et si tôt brisé. Laure, en effet, n’avait pas pris gaiement la chose. Elle n’avait épousé Gaston que pour avoir un titre ; elle avait troqué ses écus contre une couronne de marquise ; sa couronne brisée, son titre déchiré, elle avait fait un marché de dupe. Elle eût rougi de se plaindre ; quel re-

  1. Voyez les livraisons des 1er, 15 septembre, des 1er, 15 octobre, et du 1er décembre.