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momens de ses belles campagnes on a pu le voir douloureusement préoccupé d’avoir en définitive pris parti contre les Slaves. Aujourd’hui, après la triste issue de la guerre, on aimerait à croire que le Polonais jugent enfin à sa valeur la politique qui, au nom des principes radicaux n’a pas craint de les armer contre leurs frères de race. Le slavisme sincèrement pratiqué est désormais le seul fil conducteur à l’aide duquel l’émigration polonaise puisse sortir du labyrinthe où elle s’est si imprudemment engagée. Si la guerre de Hongrie a pu rallier à cette conviction la majorité, des Polonais, elle aura laissé du moins un résultat utile en compensation des maux qu’elle a causés et des ruines qu’elle a faites. C’est une démonstration nouvelle de l’aveuglement du radicalisme qu’elle aura donnée à l’émigration polonaise. Puise cette démonstration n’être pas perdue pour l’Europe !


I

Au mois d’octobre 1848, l’Autriche est livrée à une agitation bruyante où il est d’abord difficile de se reconnaître. De Presbourg jusqu’aux colonies des Sicules, des Carpathes à la Save, le pays est en émoi ; le cri de guerre est parti à la fois de la Hongrie, de la Transylvanie et de la Croatie, et les échos de la Pologne ont répondu. D’un côté, c’est Kossuth qui menace et frappe du pied le sol pour voir si, comme ce héros d’autrefois, il en fera sortir des soldats tout armés ; de l’autre, voici Jellachich qui, par des paroles plus simples et avec une éloquence sentencieuse ; ébranle les solides fantassins des colonies et les volontaire croates ; il les pousse de Warasdin vers Pesth dans la droite direction des boulets. ; Le Magyar, qui jusqu’alors n’avait pas douté un moment de sa supériorité, commence s’étonner de cette audace de ses sujets révoltés. Le gentilhomme petit ou grand, cultivateur ou magnat, détache de la muraille son sabre de parade fait retentir ses éperons, saute à cheval et s’enivre du bruit du fer. L’armée hongroise va donc entrer en scène et marcher contre les Slaves, puis contre l’Autriche elle-même, au nom de l’intérêt magyar. Quelle sera la composition de cette armée révolutionnaire ? Voilà ce qu’il importe de préciser avant tout.

La Hongrie, à l’envisager en dehors de la question des races, est l’un des pays du monde qui renferme à l’état brut le plus d’élémens militaires. En effet, de tous les états qui ont vécu sous le régime de la féodalité, aucun n’en a mieux conservé l’organisation, et je pourrais dire l’existence. C’est le premier trait de caractère qui vous frappe aussitôt que vous avez mis le pied sur cette terre encore inculte plus qu’a demi. Les châteaux de défense avec cet appareil de guerre étaient encore, avant les derniers événemens, de vraies forteresses où tout seigneur