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quoiqu’en nombre moindre, coûtent à l’état près de trois fois plus que les nôtres. Ils sont plus nombreux à l’administration centrale, et moins nombreux dans les arsenaux. La cause de cette différence consiste en ce qu’une grande partie du travail se fait à Londres, celui des bâtimens armés par exemple. Ceux-ci, après avoir eu jadis une comptabilité très défectueuse, ont aujourd’hui beaucoup plus de rapports et d’états à dresser que nous n’en avons à bord de nos bâtimens. Le détail du travail est néanmoins analogue à celui qui se fait en France, sauf celui des vivres et de l’habillement. Les arsenaux n’ont donc que leur matériel, et de qui simplifie leur travail d’administration, c’est qu’on n’y répare que des bâtimens à l’état de désarmement. Les bâtimens armés, en principe, ne doivent point avoir besoin de réparations, ils doivent se suffire pendant les trois ou quatre ans que dure leur armement. Pendant ce temps, on ne les fait revenir que le moins possible en Angleterre. Chez nous, au contraire, un bâtiment n’aurait-il que six mois d’armement, s’il vient dans un port de France, il a tout de suite besoin de réparations, de rechanges, de modifications, la plupart inutiles, toutes choses qu’il n’aurait certainement pas faites, s’il était resté hors de France. Il en résulte une grande complication d’administration, beaucoup de travail pour les arsenaux, travail souvent peu utile, et enfin une dépense d’argent et de temps qui se traduirait en sommes assez rondes, si on en faisait le relevé. On n’a point dit cela l’autre jour à l’assemblée. C’est cependant l’un des vices les plus évidens de la marine, sut lequel la commission d’enquête aura certainement à porter son examen.

Revenons à l’administration anglaise. Chose singulière, pendant que nous tendons à simplifier la nôtre, les Anglais compliquent la leur parce que, comme nous, ils cherchent à se rendre, et qu’on ne peut se rendre compte autrement. Ce qui leur donne l’avantage sur nous, c’est qu’ils ont horreur, de la multiplicité des états pour un même objet. Il est rare qu’il soit jamais dressé plus de deux expéditions d’un même état, tandis que nous en faisons jusqu’à trois et quatre copies sans compter la souche. Il y a là, pour les Anglais, une économie bien claire et de temps et d’argent. De plus, si les formalités se rapprochent dans les deux pays, il n’en est pas de même des formules. Dans un royaume où le temps est de l’argent, on s’est appliqué à les abréger, à les réduire à leur plus simple expression. Pas de lettre d’envoi, pas de phrases pour dire un fait, pas de préambules ; le fait, l’état, l’ordre tels quels : économie de temps, de papier, qui semble minime et ridicule, qui n’en est pas moins une économie sensible, et qui se traduit par une obéissance plus absolue, une intelligence plus prompte. La forme rapide comporte l’exécution rapide. On ordonne, on n’invite pas. Ceci est dans l’esprit du pays ; on veut arriver tout de