Page:Revue des Deux Mondes - 1850 - tome 6.djvu/251

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

finit par s’apercevoir que son église courrait grand risque de ne pas être une assemblée de saints, si elle abandonnait chacun à son oracle infaillible. Que fit-il alors ? A peu près ce qu’avait fait Luther. Son hypothèse mystique ne l’avait conduit qu’à détruire et à compter sur ce qui ne devait pas se réaliser. Quand il fallut faire face aux difficultés qu’il n’avait pas prévues, il revint instinctivement au principe d’autorité, à ce que j’ai appelé la seconde hypothèse de Barclay. Il emprunta aux puritains l’idée mère de leur organisation ecclésiastique, l’idée que l’église a mission de surveiller et contrôler la conduite privée des fidèles. Sur cette base, lui et ses principaux disciples élevèrent peu à peu tout un système de gouvernement dont voici les principaux traits :

Plusieurs congrégations sont réunies sous la juridiction d’une assemblée mensuelle. Au-dessus des assemblées mensuelles sont d’autres synodes trimestriels, dominés eux-mêmes par un meeting annuel qui décide en dernier ressort. Des anciens, hommes et femmes, ont mission d’apaiser les querelles, de visiter les indigens, de conseiller les faibles et de censurer d’abord en particulier ceux qui s’écartent de la droite voie. Si leurs admonestations ne sont pas écoutées, les meetings mensuels censurent en public et prononcent au besoin des sentences de désaveu ou d’excommunication. Les mêmes assemblées ont encore pour attribution d’enregistrer les naissances et les décès, de présider aux mariages, de veiller à l’éducation de la jeunesse, de procurer du travail aux malheureux et de régler arbitralement les différends ; car nul quaker ne peut en citer un autre devant les tribunaux sans perdre sa qualité de membre de la société. De toutes les décisions des meetings mensuels appel peut être interjeté devant les assemblées trimestrielles, qui, d’ailleurs, reçoivent leurs rapports et leur transmettent les circulaires du synode annuel. Non-seulement tous ces meetings ont à s’enquérir si leurs administrés observent les règles de la discipline, s’ils sont exacts à ne point payer les dîmes, s’ils acquittent scrupuleusement leurs engagemens commerciaux et les impôts du pays : chacun d’eux est encore appelé à rendre compte de l’état des ames et des opérations du Seigneur à leur égard. Bien plus, les assemblées reçoivent les communications religieuses des fidèles, la confidence des troubles qu’ils ont traversés et des consolations qui leur ont été accordées. Une sorte d’enquête permanente est ainsi ouverte pour engager chacun à