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croissent glorieuses ; d’autres, plus brillantes à leur origine, meurent misérablement. La volonté humaine intervient à chaque instant pour sauver, maintenir ce qui aurait dû logiquement périr, pour ressusciter ce qui était éteint, — et une volonté inconnue, dont les desseins sont inexplicables (demandez à M. Proudhon, que cette volonté inconnue désespère), intervient, de son côté, pour frapper de mort ce qui semblait assuré de vivre. Cependant il est certains faits assurés, aussi immuables que les faits matériels, et qui échappent à la volonté humaine : tels sont le partage du genre humain en races distinctes et par suite la différence du caractère, des facultés et des dons qui ont été accordés à chacune de ces races. Cette division du genre humain en races nous oblige à croire que les nations ont, non pas une destinée fatale, mais une destination morale, qui est cachée en elles, qui se trahit dans leur vie, dans leurs actions et jusque dans leurs erreurs. Quelles ont été les diverses manières de vivre, quels ont été les différens caractères moraux des peuples, et quel but en rapport avec ce caractère ont-ils poursuivi ou atteint ? tels sont les enseignemens les plus synthétiques, si nous pouvons nous exprimer ainsi, que l’histoire puisse nous donner, et qui nous conduisent à cette idée de destinations assignées à chaque nation. Quand on arrive ici, la tâche de l’histoire est accomplie, celle de la métaphysique et de la religion commence ; les faits cessent d’exister, et ne peuvent plus nous être d’aucun secours pour entrer dans ce monde surnaturel et sublime.

Avant d’abandonner ces réflexions générales, nous hasarderons en passant cette réflexion, que la philosophie de l’histoire aurait besoin de subir une altération analogue à celle que Leibnitz fit subir à la philosophie cartésienne pour la débarrasser du spinozisme. Dans la philosophie de l’histoire, il serait nécessaire qu’un grand et sage esprit vînt substituer la notion de force à la notion de substance, et fit une application des doctrines leibnitziennes aux faits historiques. Au lieu de cette unité confuse et de cette fatalité logique dont nous entretiennent les modernes théoriciens qui donc nous établira la hiérarchie préétablie et nous déroulera le combat providentiel de ces forces premières appelées caractères, instincts des races, et d’où découle l’histoire ? Qui nous donnera une monadologie historique ? Mais abandonnons cette pensée, qui, pour être développée, demanderait des volumes, et, pour faire une application des observations précédentes, voyons si la simple description des vertus et des qualités de la race la plus puissante du monde actuel ne pourra pas mieux que tous les appareils métaphysiques nous renseigner sur sa destination providentielle.

De toutes les races qui occupent aujourd’hui la scène du monde, la plus active, celle qui pèse le plus fortement sur la terre, est certainement