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CHRONIQUE DE LA QUINZAINE.


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14 octobre 1851.

On nous rendra cette justice, que jamais ici nous n’avons été les échos obligés d’un homme ou d’un parti. Nous cherchons avant tout dans notre loyauté d’honnêtes gens et d’écrivains consciencieux, nous cherchons à rendre l’impression la plus exacte et la plus sincère que les événemens nous laissent à mesure qu’ils se déroulent. Cette impression, nous n’allons pas volontiers la demander aux conciliabules plus ou moins autorisés dans lesquels on prétend décider pour la France et sans elle, nous n’allons pas davantage interroger en esclaves ces dictateurs qui s’arrogent trop souvent le droit de confisquer une opinion tout entière au profit de leur caprice ou de leur fortune. Nous nous sommes incessamment appliqués à reproduire les émotions et les pensées de cette grande masse du public impartial qui vit en dehors des coteries, qui juge les personnes et les choses avec son simple bon sens, qui ne se préoccupe pas des calculs individuels, qui obéit d’ordinaire par un véritable penchant aux lois les plus manifestes de l’intérêt général. Nous savons tout ce qu’il y a d’objections faciles contre les impulsions de cette foule obscure ; nous ne voulons pas dire qu’elle ne se laisse jamais emporter à la mobilité même de ses sensations, et qu’elle ne soit point quelquefois la dupe des prestiges dont elle subit l’empire. Nous disons seulement qu’au bout d’un temps assez court, toutes ces variations se compensent et se balancent ; nous disons qu’il se fait une sorte de moyenne équitable dans les idées communes, et cette moyenne que nous y trouvons en tout, nous tâchons de l’exprimer. Notre effort est de saisir cette appréciation instinctive du pays par lui-même et de la lui renvoyer fidèlement. Ce n’est pas toujours une tâche commode ; il faut se résigner à s’isoler un peu, à ne point suivre quand même tous ces petits drapeaux de circonstance qui ne sont jamais la bonne monnaie d’un grand ; il faut s’exposer aux mécontentemens alternatifs des uns et des autres, les partis et leurs chefs établissant en règle qu’on n’a pas le droit de ne point leur donner de gages, et accusant de désertion quiconque ne s’enrôle pas. Nous avons connu ce qu’il en coûtait de résister à ces exigences ; nous avons vu plus