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population au-dessous de trois millions d’habitans, dont un cinquième vit à la charge des quatre autre cinquième, la Hollande supportait un budget de 140 millions, sans compter les budgets communaux, souvent presque aussi lourds, et les administrations extrêmement coûteuse des digues (Polderlasten) : Les ressources du pays ne suffisaient plus pour les dépenses de l’état : il y manquait près de 23 millions, qui fuient mis à la charge des colonies malgré leur état de gêne excessive. Depuis 1830, les colonies avaient dû fournir chaque année une trentaine de millions au budget de la métropole. On se demandait avec effroi où cet état de choses pouvait aboutir, et si, accablé de pareilles charges, le pays n’était pas exposé à périr en pleine paix. Ce désastre même paraissait certain dans le cas où les ressources incertaines fournies par les colonies viendraient un jour à faire défaut.

Avant la fin du règne de Guillaume Ier, en 1840, M. Rochussen avait été appelé aux finances. Il était resté chargé de ce département sous Guillaume II. C’était un financier d’une grande expérience, vieilli dans l’administration, dont il avait parcouru tous les grades. Il proposa, pour couvrir les déficits des années précédentes, une nouvelle inscription au grand livre et une nouvelle émission de bons du trésor. Le premier budget biennal de 1842 et 1843 s’élevait à 142 millions de francs, et ne répondait guère aux promesses de réduction qui avaient été faites aux états-généraux. Les délibérations sur le budget de 1844 et 1845 se prolongèrent, et furent plus sérieuses encore que les précédentes. L’opposition s’était accrue considérablement et comptait presque tous les noms importans de la deuxième chambre MM. Luzac, Bruce, de Golstein, Dam van Ysselt, Sasse. La seconde section du budget fut même rejetée ; mais on recula devant le rejet en masse, dans la crainte qu’un vote si ouvertement hostile au pouvoir n’entraînât une refonte radicale de la loi fondamentale, déjà révisée en 1840, et n’amenât des élections directes. « La banqueroute, la hideuse banqueroute » apparaissait cependant, et beaucoup de personnes la considéraient comme l’unique voie de salut. Le remède était plus dangereux que le mal : c’était la ruine du commerce comme des finances de la Hollande, qui eût ainsi, en pleine paix, rayé son nom de la liste des états indépendans. Le gouvernement se mit donc à chercher de nouveaux expédiens. Après une tentative infructueuse de réduction de la rente, M. Rochussen se retira. M. van der Heim lui succéda, et échoua à son tour avec un projet d’impôt sur la rente.

Cette série de tentatives avortées et la détresse financière encore