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rarement leurs fonctions plus de trois années. Le pouvoir est en outre partagé entre plusieurs officiers indépendans les uns des autres, dont le concours est nécessaire pour tous les actes importans, et qui doivent déférer au jugement de la cour les affaires sur lesquelles ils n’ont pu s’accorder. Ainsi, à côté du vice-roi, entouré de tout l’éclat de l’autorité suprême, fastueux fonctionnaire dont le traitement annuel est de 120,000 francs, vient se placer le lieutenant-gouverneur, le fou-yuen, dont la juridiction n’embrasse qu’une seule province, mais qui ne subit en aucune façon le contrôle du gouverneur-général. Ce dernier ne peut, sans l’aveu du fou-yuen, appliquer le wang-ming, ce droit de vie et de mort en vertu duquel, dans les cas urgens, un criminel est immédiatement exécuté, sans qu’il soit besoin de demander à Pe-king la confirmation de la sentence. Le commandement de la force armée est confié à un général tartare qui répond seul de la défense de la ville. L’administration des finances appartient au directeur-général des douanes, au receveur-général des contributions et au surintendant-général des salines; celle de la justice est réservée au Juge criminel, qui n’est assisté des autres autorités de la province que lorsqu’il s’agit de prononcer la peine capitale. Tel est le personnel auquel est dévolue la haute administration de la vice-royauté et de la province. Sous le contrôle de ces grands fonctionnaires s’exerce le gouvernement du département et du district. Le département est placé sous les ordres d’un magistrat civil qui remplit, avec des attributions plus étendues, des fonctions analogues à celles de nos préfets. Chaque district a son sous-préfet, revêtu, comme le magistrat du département, de pouvoirs à la fois administratifs et judiciaires. Le département de Kouang-tcheou, dont Canton fait partie, est divisé en quatorze districts, et la ville de Canton ressort des deux districts de Pouan-you et de Nan-haï. Les sous-préfets nomment dans chaque commune un maire chargé de la police et de la levée des impositions. Ces maires sont des agens très subalternes, qui portent rarement le bouton des lettrés, et que le sous-préfet soumet sans façon à la bastonnade. Dans les campagnes cependant, s’il y a quelques travaux publics à entreprendre ou une affaire grave à décider, ce sont eux qui président le conseil des anciens et qui dirigent les délibérations. L’administration chinoise est, on le voit, peu compliquée : quatorze mille mandarins civils suffisent à gouverner trois cent soixante-un millions d’ames; mais cette simplicité de ressorts, en accumulant d’immenses prérogatives sur la même tête, a dû entraîner à sa suite les inconvéniens inhérens aux administrations despotiques, — la vénalité de la justice et les plus odieuses exactions dans la perception des impôts. Les tribunaux mettent pour ainsi dire à l’encan la sentence qui condamne ou celle qui absout. Les Chinois sont soumis au paiement d’une