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FONDATION


DE LA


RÉPUBLIQUE DES PROVINCES-UNIES





I.


MARNIX DE SAINTE-ALDEGONDE

ET LES GUEUX DES PAYS-BAS.




Nos révolutions éclairent chaque jour d’une lumière nouvelle les révolutions passées, et à ce titre il appartient à notre temps de refaire l’histoire des troubles des Pays-Bas, chaos sanglant d’où surgit à la fin la république néerlandaise. Les vastes récits contemporains ont gardé leurs beautés classiques ; nous les admirons encore, ils ne nous suffisent plus. Sous la pompe de Strada, sous le coloris éclatant de Bentivoglio, sous la gravité antique de Grotius, nous cherchons l’enchaînement, l’esprit de suite, ou, pour mieux dire, l’âme des choses. La vraie manière de compléter ces écrivains serait de montrer ce que nos expériences ont ajouté à leur science, et ce ne serait point là non plus une trop grande ambition, car il n’est aucun temps de l’histoire où les idées des hommes aient été plus ouvertement et plus bravement affichées, où il soit plus aisé de lire la destinée des peuples dans les croyances qu’ils embrassent. Ce ne sont pas seulement des armées, ce sont des esprits qui s’entrechoquent des extrémités opposées de l’horizon moral. Malgré l’horrible mêlée, rien de plus lumineux ni de mieux réglé que cette bataille de quatre-vingts années, à peine interrompue par une trêve que repousse également la conscience des deux partis. Dans cet intervalle, chaque