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au palais de cristal des Champs-Élysées en 1855 ; mais au lieu des moyens puissans ou grossiers des arts de moulage déjà connus, M. Jacobi, aidé par la munificence d’un empereur qui avait fondé l’observatoire de Poulkova, et que l’univers aujourd’hui regrette de voir oublier les belles paroles de Napoléon Ier sur le pouvoir social de la science, — M. Jacobi, disons-nous, demande à l’électricité de déposer sur un modèle en creux ou en relief une couche de métal qui paisiblement, sans feu, sans fusion, sans altération du modèle, prît l’empreinte fidèle de l’objet, et de plus formât une masse, métallique solide d’une épaisseur considérable et susceptible de reproduire par contre-épreuve et en métal aussi solide que du métal fondu la gravure, le relief et toutes les finesses artistiques du modèle. Par ce procédé, une planche gravée, une médaille, une coupe de Benvenuto Cellini, se reproduisent sans autre agent que l’électricité et le temps. Les bronzes antiques ont pour grand mérite leur légèreté et le peu d’épaisseur de la couche métallique dont l’extérieur saillant est la sculpture. Ce mérite est encore plus grand pour les sculptures métallico-électriques de M. Jacobi, produites par l’électricité prenant le métal dans un bain chimique pour le déposer à l’intérieur ou à l’extérieur d’un moule quelconque. Ici on est exempt de tous les embarras de l’ajustage des pièces de l’enveloppe pour les reliefs très accidentés, comme de tous les dangers et accidens du feu. Ce nom de galvanoplastie indique la production électrique d’un métal solide, au moyen de parties déposées paisiblement par l’agent voltaïque. C’est, en un mot, la sculpture, le modelage ou moulage électrique.

Presque à la même époque M. Spencer, en Angleterre, obtenait des résultats moins complets, mais de la même nature. M. Bocquillon, en France, et plus tard M. Mathiot, en Amérique, faisaient aussi faire des progrès à la galvanoplastie. L’histoire rétrospective de la science retrouve encore quelques essais de Volta et de Brugnatelli, qui pouvaient être regardés comme l’aurore du grand jour que M. Jacobi et M. Spencer firent luire plus tard sur la galvanoplastie. Pour sortir de l’historique et fixer nos idées sur l’état actuel de la galvanoplastie, je ne citerai comme des types de fabrication que deux industriels ou artistes français, MM. Coblentz et Hulot.

Arrivons chez le premier de ces artistes, dans un atelier de la rue Charlot. Cet atelier n’est pas un appartement, pas même une mansarde, c’est plutôt un galetas où de sales baquets pleins d’un liquide métallique soumis à l’action de piles de Volla de la plus grossière forme travaillent silencieusement à l’œuvre artistique dont les élémens sont empruntés à la science de l’électricité. La manœuvre consiste à remplir de liquide les baquets, à entretenir les lames de cuivre, de zinc qui constituent la partie active du procédé. Vous détournez les yeux d’un travail opéré par des ouvriers inintelligens gagés d’un salaire proportionné à leur capacité, et dans la salle voisine, qui contient par milliers les produits obtenus, vous trouvez des objets digues d’admiration. Ce sont des bronzes d’une étonnante légèreté et d’un relief qu’il y a peu d’années on aurait jugé impossible. Ce sont les planches des cartes du dépôt de la guerre reproduites avec une telle fidélité, qu’il est impossible de distinguer les épreuves tirées avec les planches galvanoplastiques d’avec les épreuves tirées avec la planche primitive ; mais le prix de ces dernières n’est