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lie l’honneur des gouvernemens sans engager directement la personne des souverains. On pouvait prévoir le moment prochain où la signature de ce protocole lui donnerait une signification imposante, ce serait celui où la Russie répondrait par un refus ou par le silence à la sommation qui lui était faite d’évacuer les principautés. Les deux puissances occidentales communiqueraient alors la réponse de la Russie à la conférence de Vienne, en prenant ouvertement l’attitude belligérante, et ce serait en présence de cette nouvelle attitude de leur part que l’Autriche et la Prusse, maintenant malgré ce changement leur entente avec elles, imprimeraient un caractère plus intime et une force morale plus grande à leur alliance par la signature collective d’un protocole général, qui d’ailleurs serait la reproduction textuelle de la convention projetée.

Ce plan fut ponctuellement suivi, et le protocole du 9 avril en sortit. Qu’on relise ce document à la lueur des explications que nous venons de donner ; que l’on n’oublie point qu’il renferme l’amendement et l’addition par lesquels l’Autriche avait renforcé le projet de convention, amendement qui retire la perspective du renouvellement des anciens traités de la Porte avec la Russie, addition qui établit entre les quatre puissances une solidarité de principes et d’action diplomatique à l’abri des événemens, et l’on en comprendra toute la portée.


« Sur la demande des plénipotentiaires de France et de Grande-Bretagne, la conférence s’est réunie pour entendre la lecture des pièces qui établissent que l’invitation adressée au cabinet de Saint-Pétersbourg d’évacuer les principautés moldo-valaquos dans un délai fixe étant restée sans réponse, l’état de guerre déjà déclaré entre la Russie et la Sublime-Porte existe également de fait entre la Russie d’une part et la France et la Grande-Bretagne de l’autre.

« Ce changement opéré dans l’attitude de deux des puissances représentées dans la conférence de Vienne en conséquence d’une démarche tentée directement par la France et l’Angleterre et appuyée par l’Autriche et la Prusse comme fondée en droit, a été jugé par les plénipotentiaires d’Autriche et de Prusse comme impliquant la nécessité de constater de nouveau l’union des quatre gouvernemens sur le terrain des principes posés dans les protocoles des 5 décembre 1853 et 13 janvier 1854.

« En conséquence, les soussignés ont, à ce moment solennel, déclaré que leurs gouvernemens restent unis dans le double but de maintenir l’intégrité territoriale de l’empire ottoman, dont le fait de l’évacuation des principautés danubiennes est et restera une des conditions essentielles, et de consolider, dans un intérêt si conforme aux sentimens du sultan et par tous les moyens compatibles avec son indépendance et sa souveraineté, les droits civils et religieux des chrétiens sujets de la Porte.

« L’intégrité territoriale de l’empire ottoman est et demeure la condition sine qua non de toute transaction destinée à rétablir la paix entre les puissances