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représentatif, il avait d’abord été question de donner au royaume de Naples un régime consultatif entouré de garanties sérieuses. Ce projet, comme presque tous les projets de cette espèce, était une véritable chimère ; mais M. de Metternich s’en était servi pour amadouer l’empereur Alexandre, pour l’amener à renoncer avec moins de regrets à ses rêves de constitution. Dans l’enivrement de la victoire, il fut définitivement mis de côté, ou du moins réduit à des proportions tellement insignifiantes, que les plus ardens défenseurs du despotisme auraient pu difficilement y trouver à redire. L’Autriche, pesant à la fois sur les Deux-Siciles et sur le Piémont au moyen d’une occupation militaire qu’elle se faisait chèrement payer, maintint dans ces deux royaumes l’intégrité du pouvoir absolu, et crut faire assez pour la prudence et pour l’humanité en empêchant qu’à Naples le rétablissement de l’autorité royale ne fût souillé par le renouvellement des cruautés abominables qui avaient déshonoré la restauration de 1799.


IV.

Désormais la politique anti-libérale de M. de Metternich ne rencontrait plus aucun obstacle dans la volonté de l’empereur Alexandre. Il était complètement subjugué. Les vives émotions de la dernière crise avaient achevé dans son âme ardente et faible la transformation contre laquelle il se débattait depuis deux ans. À partir de ce moment, les idées de liberté et de droits des peuples lui devinrent aussi odieuses qu’elles lui avaient été chères jusqu’alors ; le mot de constitution sembla lui inspirer cette irritation, cette antipathie que l’on éprouve pour ce qui, en rappelant d’anciens égaremens, éveille au fond du cœur des remords ou des regrets trop amers. Le besoin d’activité continue dont il était possédé prit une direction nouvelle : poursuivre, anéantir partout la révolution, tel fut le but qu’il se proposa et qu’il résolut d’atteindre au prix des plus grands sacrifices. Dans son impatience, le ministère de M. de Richelieu ne se montrant nullement disposé à intervenir en Espagne, il pariait d’envoyer une armée russe renverser la constitution de 1812.

L’insurrection du peuple grec soulevé pour reconquérir son indépendance n’était à ses yeux qu’un des incidens de la grande conspirations révolutionnaire. Cette insurrection, promptement étouffée dans les principautés du Danube, où elle avait pris naissance, mais qui faisait chaque jour des progrès sur le continent et dans les îles de la Grèce proprement dite, l’irritait d’autant plus que des agens russes, s’abusant sur les intentions actuelles de leur maître, en avaient évidemment favorisé l’explosion, ce qui faisait planer sur sa