Page:Revue des Deux Mondes - 1854 - tome 7.djvu/948

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

en temps de guerre moins durement qu’ils ne le sont partout ailleurs en temps de paix.

Mais le chancelier de l’échiquier, qui avait déjà introduit dans le système financier le droit sur les successions, a craint d’exagérer l’impôt direct et de compromettre, en surchargeant les résultats, la fortune naissante du principe. L’équité lui a paru conseiller de ne pas faire supporter entièrement le fardeau de la guerre aux personnes qui jouissaient d’une certaine aisance, à une seule classe de la population. Il a préféré demander le dernier tiers de ce tribut extraordinaire aux impôts indirects, qui s’adressent aux consommateurs de toutes les classes. On a donc augmenté les droits sur les spiritueux, qui doivent fournir un supplément de 450,000 liv. sterl. ; sur les sucres de toute provenance, dont on espère obtenir 700,000 liv. sterling de plus, et enfin sur la taxe qui frappe la drèche, et qui est portée de 2 sh. 8 d. 1/2 a 4 sh. par boisseau. M. Gladstone attend de cet impôt, qui produit annuellement 5 millions sterling, une ressource supplémentaire de 2,450,000 liv. sterl. La drèche rendra ainsi à elle seule au trésor 187,500,000 fr., ou 60 et quelques millions de plus que tous les spiritueux ensemble, vins, bières, cidres, alcools, ne rapportent à la France.

Cette dernière partie du plan ministériel a été sanctionnée par le parlement comme les autres, mais avec un assentiment moins général. M. Gladstone fait valoir que la drèche a été successivement dégrevée depuis la paix de 1816, que l’on a supprimé l’impôt sur la bière, qui était en quelque sorte un double emploi, enfin que les autres spiritueux se trouvent beaucoup plus fortement taxés, et qu’il n’y a que stricte justice à l’assimiler davantage au tarif commun. Jusqu’à présent, l’assimilation des taxes s’était opérée par voie de réduction, en modérant les plus élevées, et non par voie d’augmentation, en exagérant les plus modestes. Il a dû en coûter à M. Gladstone de donner ce démenti taux principes que sir Robert Peel avait légués à ses collègues, et que le chancelier de l’échiquier lui-même professait naguère avec tant d’éclat.

Une question plus grave s’élève. Le gouvernement de la Grande-Bretagne a-t-il suivi la meilleure politique en demandant à l’impôt des ressources que le crédit pouvait fournir ? Les raisons de cette préférence ont été déduites avec beaucoup de force parle chancelier de l’échiquier dans son exposé du 7 mars ; en voici les passages les plus saillans :

« Il n’est pas possible au gouvernement, il n’est pas possible, à la chambre des communes, il n’est pas possible au pays, de s’engager d’une manière absolue, ni par une résolution immuable, à défrayer les dépenses de la guerre par des augmentations d’impôt ; mais ce qu’il nous appartient de faire, c’est