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vraisemblance, ne coûta au roy, dit Pélisson, que le marquis de Bourlemont, colonel du régiment de Picardie, trois mousquetaires, six grenadiers à cheval, un capitaine de Picardie et environ quarante soldats. La garnison, au nombre de trois mille hommes, demeura prisonnière de guerre et fut emmenée en France. Le comte de Solre, le comte de Taxis et le colonel Silva furent pris en combattant dans l’ouvrage à cornes au commencement de l’attaque. Le marquis de Richebourg, blessé, avait été fait prisonnier dans sa maison, M. des Prés aussi. Le roy donna à ses mousquetaires les chevaux de la garnison, qu’il fit démonter. A peine la capitulation que le roy accorda aux bourgeois fut-elle signée, le jour même de l’assaut, le 17 mars, que tout parut aussi tranquille dans la ville que si elle n’avoit point été assiégée. Malgré les ordres que le roy avoit donnés pour garantir la ville du pillage, il auroit été bien difficile d’en venir à bout, si l’on n’avoit pas eu affaire aux mousquetaires, qui n’ont en vue en combattant que le gloire. »

Louis XIV n’entra pas à Valenciennes à cette époque ; il resta à son quartier-général, d’où il partit le 21 mars pour Cambrai. Il ne visita Valenciennes qu’en 1680 avec la reine, le dauphin et toute la cour. Il y revint en 1684. Le 27 mars, il écrivait au maréchal de La Ferté-Sénecterre : « Mon cousin, je suis bien aise de vous avoir vengé de Valenciennes; je crois même que vous ne serez pas fâché que, comme l’injure que vous y avez reçue[1] ne vous fait point de tort dans mon esprit, je n’aie pas poussé plus loin ma vengeance. J’aurois peine à trouver d’autres lieux où l’on pût vous venger de la sorte : vous y avez mis trop bon ordre pendant cette longue suite d’années où vous avez si dignement servi moi et l’état. » Louis XIV savait, dans ses relations habituelles, tempérer la pesanteur du pouvoir absolu par une recherche d’amabilité et une urbanité extrême qui lui gagnaient tous les cœurs, et dont on ne l’a jamais vu se départir.

Aussitôt après la prise de Valenciennes, le roi se dirigea sur Cambrai pour en faire le siège, et Monsieur, avec une partie de l’armée, alla prendre position devant Saint-Omer. Un an plus tard, la paix de Nimègue était signée.


LE PRINCE DE LA MOSKOWA.

  1. Louis XIV fait ici allusion à l’affaire de 1653, où le maréchal avait été fait prisonnier par Condé.