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Et l’on doit remarquer qu’aucune des circonstances qui accompagnent la combinaison ne reste sans explication. Nous ne savons, il est vrai, absolument rien des forces qui s’exercent entre les atomes des corps ; mais, sans rien préjuger sur leur nature ou leurs lois, il est évident qu’au moment même ou la combustion s’opère et où les molécules antagonistes se réunissent, un mouvement intestin s’établit, et de là naît cette convulsion transitoire qui se révèle par une détonation, par une production de chaleur et de lumière. Quand cette transformation a été accomplie, le composé nouveau est constitué, ses molécules sont plus pesantes que les atomes composans, les forces qui président à leur distribution sont changées, et les propriétés des élémens ne se retrouvent plus dans le produit de leur réunion. Ainsi la combinaison s’explique, les phénomènes de la combustion se conçoivent, et les transformations de propriétés se prévoient. Il y a plus, la constance des proportions des élémens est une conséquence forcée de la théorie atomique. Si l’oxygène et l’hydrogène se combinent, c’est que toutes les molécules du premier de ces corps se réunissent chacune à un atome du second ; il y a donc le même nombre d’atomes dans les proportions des deux gaz qui se réunissent, il y a entre elles un rapport mathématique absolument invariable. Tout ce que nous connaissons vient de s’expliquer, tout ce qu’il nous reste à apprendre pourrait aisément se deviner. Je pourrais montrer comment un atome d’un corps simple, s’agglutinant avec un, deux trois ou quatre molécules d’un autre, peut produire autant de composés définis et distincts, ce que l’expérience justifie ; je pourrais montrer aussi ces atomes se réunissant en couches régulières, se superposant comme les assises des monumens pour former des édifices symétriques que l’on nomme des cristaux ; j’aurais à parler du rôle des atomes dans la physique générale, dans l’électricité, dans l’optique : j’aime mieux réserver ces développemens, et tirer de cette digression déjà longue les conséquences en vue desquelles je l’ai commencée. Dire que 100 grammes d’oxygène et 12 grammes d’hydrogène se réunissent pour constituer l’eau, c’est exprimer que dans ces deux poids des deux gaz se trouve un nombre égal d’atomes, ou, ce qui est la même chose, si les atomes de l’oxygène pèsent 100, le même nombre de molécules d’hydrogène pèse 12, ou enfin, comme dernière expression, un atome d’oxygène pèse 100, et un atome d’hydrogène pèse 12. La chimie arrive ainsi à ce résultat merveilleux non-seulement de démontrer l’existence des atomes, mais encore de comparer leurs poids. Elle a fait par l’ensemble de ses analyses sur tous les corps simples ce que nous venons d’expliquer spécialement pour les deux gaz qui nous servaient d’exemple : elle a dressé le tableau des poids atomiques de toutes les substances de la nature. N’oublions pas maintenant que Dulong et Petit ont traité cette