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ou non à sa nature, il meurt et est digéré, ou bien il résiste à l’action dissolvante des liquides qui le baignent, et entre dans une nouvelle phase de développement. Par exemple, un œuf de distome, tombé sur la feuille de quelque végétal aquatique, est avalé par un limnée ou une paludine ; il éclot à l’intérieur du mollusque et en gendre un scolex (larve ciliée), qui produit sur place son strobila (sporocyste). De celui-ci sortent plusieurs proglottis (cercaires) qui d’abord nagent quelque temps autour de l’animal où elles ont pris naissance. Quand arrive le moment de leur métamorphose, celles qui se fixent sur les pierres, les feuilles, etc., ne tardent pas à périr, mais toujours quelques-unes ont rencontré des larves d’insectes ou des mollusques appropriés à leur nature, ont percé leurs tégumens et ont placé leur coque dans des conditions convenables. Elles restent là jusqu’au moment où leur hôte temporaire est à son tour avalé par quelque grenouille ou quelque oiseau d’étang, et c’est dans ce dernier seulement que le jeune distome acquiert ses caractères définitifs et complète son organisation.

Ces migrations singulières, accomplies par un procédé si bien fait en apparence pour amener la mort des helminthes, se retrouvent chez les cestoïdes et les cystiques. Ici elles ont pu être constatées par des expériences directes, et le résultat de ces expériences a été de montrer que ces deux groupes, presque universellement admis comme distincts jusqu’à ces derniers temps, n’en formaient en réalité qu’un seul, de prouver que les prétendus helminthes cystiques ne représentaient qu’une phase du développement des cestoïdes. L’honneur d’être arrivé à cette conclusion à la suite d’observations et de recherches poursuivies avec une rare constance appartient à M. van Bénéden ; celui de l’avoir démontrée par des expériences précises revient à M. Kûchenmeister[1].

Grâce aux travaux de MM. van Bénéden et Küchenmeister, nous possédons aujourd’hui du développement et des migrations de tous ces êtres une histoire générale, accueillie d’abord avec quelque doute, mais que des faits chaque jour plus nombreux nous semblent de plus en plus devoir faire regarder comme l’expression de la vérité. D’après le naturaliste belge, chaque œuf de ténia donne naissance à un protoscolex ayant la forme d’un petit animal à corps presque homogène où l’on ne distingue, à vrai dire, que six crochets, ou mieux six aiguillons très aigus disposés en trois groupes[2]. Les deux aiguillons du milieu, réunis comme une lancette, perforent les tissus placés devant eux ; les deux paires latérales, prenant leur point d’appui

  1. Comptes-rendus de l’Académie des Sciences, 1853, et Annales des Sciences naturelles, quatrième série, t. Ier.
  2. Notice sur le ténia dispar et sur la manière dont les embryons de cestoïdes pénètrent à travers les tissus. — Bulletin de l’Académie royale de Belgique, 1854.