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sont plus comme l’ébauche de la contrevallation ; elles forment un système d’ouvrages entièrement séparé. Quand il commence réellement l’investissement de la place, elles ne peuvent pas servir de refuge aux travailleurs, s’ils sont trop vivement pressés par une sortie. Elles ne peuvent pas les protéger pendant le repos des nuits ; elles ne pourront pas servir de réduits et renfermer les réserves quand les lignes seront attaquées. Les camps aussi ne sont pas disséminés sur la circonférence qu’il faut garder et fortifier. Ils sont concentrés loin des ateliers, sur deux points ; la masse des troupes est vers Amancey, et depuis la défaite de la cavalerie gauloise, un second bivouac a été établi sur le Todeure. Le mode de campement et la nécessité de garder les castella ajoutent un immense surcroît de fatigues à toutes celles qui ne pouvaient déjà manquer d’accabler les légionnaires. Représentons-nous ces malheureux soldats obligés d’aller et de venir entre leurs bivouacs, les castella, les ateliers, de faire chaque jour plusieurs lieues pour aller monter leur garde ou travailler, et autant pour regagner leurs tentes. Outre les détachemens laissés au camp ou envoyés aux redoutes, il en fallait d’autres pour soutenir les travailleurs en cas de sortie ; il fallait, la nuit, fournir des postes pour relier entre eux des quartiers si espacés, pour défendre des ouvrages non terminés et situés loin des bivouacs, comme par exemple ceux qui enveloppaient la partie méridionale du massif. Il fallait encore aller au bois, à la maraude, au fourrage, et l’on était là trop loin de la Lingonie pour en tirer des vivres ou des travailleurs auxiliaires. Les soldats de César eussent-ils été deux fois, trois fois plus nombreux, qu’ils n’auraient pas pu y suffire, même en restant jour et nuit sous les armes ou en corvée, ou la pioche en main, sans prendre le temps de manger ni de dormir. Velleius Paterculus pensait qu’un dieu seul pouvait mener à fin tout ce que César avait entrepris devant Alesia. Qu’eût-il donc dit, si Alesia s’était réellement élevée sur l’emplacement d’Alaise ?

L’armée de secours paraît ; elle s’établit à l’ouest du massif, sur ces hauteurs de By et de Bartherans que César avait laissées libres lorsqu’il était arrivé vainqueur devant la place. Le combat de cavalerie s’engage encore sur la rive gauche de Todeure. Nous avons déjà dit combien peu cet emplacement nous paraissait convenir à une action de ce genre ; mais le récit des Commentaires ajoute ici un détail saisissant et que nous cherchons vainement dans la version de M. Delacroix : « De tous les quartiers qui tout autour occupaient le sommet des crêtes (ex omnibus castris quæ summum undique jugum tenebant), l’infanterie romaine peut voir et suivre les incidens du combat. » N’y a-t-il pas dans cette phrase une indication