Page:Revue des Deux Mondes - 1858 - tome 15.djvu/137

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

précise qu’il est impossible d’appliquer aux environs d’Alaise et au mode de campement imposé par la nature des lieux ?

L’attaque de nuit du surlendemain aurait été dirigée contre Charfoinge, là même où la circonvallation décrivait un rentrant qui nous semblait inexplicable ; mais avec tout autre tracé, aucune partie du retranchement n’eût pu recevoir l’épithète essentielle de campestris. Cependant ce fut grâce aux réserves tirées des redoutes éloignées (ex ulterioribus castellis) que Marc-Antoine et Trebonius purent repousser le terrible assaut des Gaulois. Or les trois redoutes les plus rapprochées du théâtre de l’action en étaient encore séparées par une distance de neuf et douze kilomètres. Entre le moment où un exprès serait allé chercher ces détachemens et celui où ils auraient pu prendre part au combat, il se serait donc écoulé au moins de cinq à six heures. On était en plein été, les Gaulois avaient quitté leur camp à minuit, leur attaque avait dû commencer vers une heure du matin ; les réserves romaines ne pouvaient donc apparaître sur le champ de bataille que longtemps après le lever du soleil. Or César nous apprend que tout était fini avant le jour.

Éclairés par leurs échecs, les généraux de l’armée de secours se décident à envoyer un des leurs, Vercassivellaun, avec 60 000 hommes, pour attaquer les lignes romaines en un point situé au nord, sur le versant d’une colline, et qui avait été jugé particulièrement faible. Cette définition s’appliquerait assez bien à cette partie de la circonvallation que M. Delacroix fait passer au-dessous de Refranche et de Doulaize. Cependant, soit qu’il ait paru trop difficile de masquer une tentative dirigée de ce côté, soit que ce front de fortification fût trop bien flanqué par le grand camp romain qui se trouvait entre Coulans, Amancey et Éternoz, c’est ce camp lui-même qui est donné pour objectif à la colonne de Vercassivellaun. À certains égards, c’eût été une bonne résolution, car le quartier des légions formait un saillant très marqué, et un succès soutenu des Gaulois sur ce point eût été pour leurs adversaires un échec irréparable ; mais nous ne sommes plus au nord, nous sommes à l’est, mais nous sommes devant des retranchemens qui méritaient l’épithète de campestres au moins autant que ceux de Charfoinge, et alors que presque partout la circonvallation passe en des lieux désavantageux, sur des versans de colline, cette partie des lignes est peut-être la seule qui ne présente pas les caractères particuliers assignés par César au front attaqué (iniquo loco declivitas). Pour l’aborder, le corps détaché doit gravir une espèce de promontoire qui s’avance jusqu’à la Loue et dont le centre est occupé par le village de Chassagne, puis faire environ dix kilomètres en terrain découvert, ce qui donnait bien aux Romains le temps de se mettre