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transféré à la couronne ; seulement une certaine part était faite à rélection dans la formation du nouveau conseil. Les grandes villes manufacturières d’Angleterre et les actionnaires de l’ancienne compagnie devenaient les grands électeurs du conseil de l’Inde. Aucune de ces combinaisons n’a paru satisfaisante. Le bill de lord Palmerston a essuyé le reproche de faire une trop large part à l’action du gouvernement au détriment de l’action individuelle, chose grave en Angleterre. Dans le bill de lord Derby, on a vu une conception plus compliquée et plus ingénieuse qu’efficace. De là est née l’idée d’écarter cette forme de la loi, et de procéder par voie de résolutions, expédient que M. Disraeli s’est hâté d’accepter dans la chambre des communes pour éviter un échec. Lord Palmerston cependant tient à son bill, et paraît décidé à le défendre. Ses amis ne désespèrent peut-être pas encore de trouver là une occasion favorable de rallier une majorité et de ramener l’ancien premier ministre au pouvoir. C’est là ce qui peut menacer le cabinet tory, et d’un autre côté ce qui peut aider à le prémunir contre toute mauvaise aventure, au moins pour la session actuelle, c’est le succès qu’a obtenu dans le parlement le budget présenté par M. Disraeli, budget habilement conçu et combiné de façon à passer à travers tous les écueils. Le ministère trouve encore un autre gage de sécurité dans la rivalité qui existe entre lord John Russell et lord Palmerston. Lord John Russell manœuvre visiblement depuis quelques jours de manière à déjouer les tentatives de lord Palmerston pour reconquérir le pouvoir. Cette neutralisation de forces dans le parti libéral est peut-être aujourd’hui la garantie la plus efficace pour le cabinet de lord Derby.

En d’autres temps, une élection de députés à Paris eût été considérée comme un événement ; il n’en a pas été de même du vote qui vient d’avoir lieu. Le vote du 25 et du 26 avril a présenté cependant ce résultat singulier, que sur trois élections un seul candidat du gouvernement, le général Perrot, a été nommé ; M. Jules Favre l’a emporté sur son compétiteur d’un autre côté, et la troisième élection est restée incertaine. Un nouveau scrutin dira prochainement le dernier mot des élections de Paris dans ce débat certes fort peu agité et pourtant significatif.

Nous approchons du terme assigné aux travaux du corps législatif. Un décret du 27 avril a prolongé jusqu’au 8 mai la durée de la session. La discussion du budget de 1859 et l’examen de plusieurs projets de loi importans rendaient ce délai indispensable. À défaut d’initiative et même de participation directe dans la direction politique du pays, soit à l’intérieur, soit à l’extérieur, le corps législatif tient à exercer strictement son droit de contrôle sur la gestion des finances. L’expérience démontrera si les concessions que le gouvernement a déjà faites aux vœux de la chambre, notamment en ce qui concerne les règles à observer pour l’ouverture et la sanction des crédits supplémentaires et extraordinaires, sont tout à fait suffisantes : question délicate, qui se reproduit à chaque session, que ramène chaque discussion de budget, et qui met en présence les prétentions respectives du pouvoir exécutif et du pouvoir législatif. Quoi qu’il en soit, et sans insister davantage sur ce point essentiel, qui est du domaine de la constitution, c’est-à-dire en dehors de toute polémique, nous devons signaler une heureuse innovation que présente le budget de 1859. Pour la première fois de-