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l’on veut connaître la situation exacte du pays et la condition de ses habitans.

Sous le rapport agricole, la Lombardie se divise en trois régions distinctes qu’il faut étudier à part : la région des montagnes, la région des collines et des hautes plaines, enfin la région des basses plaines. Dans la première dominent la propriété et la culture parcellaires ; dans la seconde, la petite propriété et la petite culture ; dans la troisième, la grande propriété et la grande culture.

La région des montagnes occupe presque la moitié de la surface de la Lombardie. Elle comprend toute la province de Sondrïo, la plus grande partie de la province de Côme et de Bergame, et les deux cinquièmes de celle de Brescia. Toute la contrée est couverte de chaînes de montagnes qui, partant de la grande chaîne des Alpes rhétiennes, s’abaissent peu à peu vers le sud, et ouvrent entre leurs hauteurs des vallées plus ou moins propres à la culture. Les principales de ces vallées sont celles de Chiavenna, qui débouche sur le lac de Côme à Riva, et qui à Colico rejoint celle de la Valteline ; la valle Brembana, au fond de laquelle coule le Brembo, la valle Seriana, arrosée par le Serio, et la valle Camonica, qui aboutit au lac d’Iseo. Dans les parties supérieures de ces vallées, on ne rencontre que des pâturages et quelques céréales ; mais dans les parties inférieures protégées contre le vent du nord, on admire déjà la végétation méridionale dans toute sa richesse.

Dans cette région, la subdivision de la propriété est extrême, et elle continue encore. Ainsi dans la Valteline, durant ces douze dernières années, le morcellement a augmenté de 21 1/4 pour 100, tandis que la population ne s’est accrue que de 7 8/9 pour 100. Dans le val Camonica et dans la province de Sondrio, on compte une propriété par 2 habitans. Comme il y avait en 1850 52,146 parcelles et seulement 28,392 hectares cultivés, chaque parcelle, en moyenne, n’était que de 54 ares. Dans les montagnes, chacun à peu près est propriétaire, et c’est ici que se vérifie à la lettre le mot d’Arthur Young : « Donnez à un individu la possession assurée d’un rocher aride, il le transformera en jardin. » Véritablement l’homme fait le sol. Aux flancs de la montagne, il construit des terrasses avec des blocs de pierre, puis la hotte sur le dos il y transporte de la terre pour y planter un mûrier ou une vigne, pour y récolter un peu de blé ou de maïs. Celui qui après avoir payé la main-d’œuvre voudrait louer le sol ainsi formé ne retirerait pas 1/2 pour 100 de son argent. Le morcellement de la propriété, quelque grand qu’il soit, n’oppose d’ailleurs aucun obstacle à la culture, d’abord parce que les champs sont naturellement divisés en très petites parties par les accidens du terrain, ensuite parce que le sol est entièrement cultivé