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suisses, espagnoles et italiennes. Enfin les sourds-muets et les marins du commerce (les marins de la flotte fédérale ont leur hôpital) possèdent aussi leurs propres sociétés de bienfaisance. Seuls, les Américains n’ont encore institué aucune société de ce genre. Il est vrai de dire que l’état dépense une somme de près d’un million de francs chaque année soit pour le service de ses hôpitaux, soit pour le secours des pauvres et des nécessiteux. Les dames de San-Francisco, constituées en association de dames patronesses, secourent aussi, sans distinction de religion ni de nationalité, toutes les familles malheureuses. Les dames de Stockton, de Sacramento et de Marysville ne sont point restées en arrière. Si les Américains n’ont pas été obligés, comme les étrangers, de recourir en Californie à des institutions de prévoyance, c’est qu’ils se sont trouvés suffisamment protégés par leurs sociétés maçonniques et de tempérance, plus encore par cette énergie, par ce courage indomptable qui fait le fonds de leur caractère. Les chances de réussite dans le nouvel état sont du reste loin d’être aussi favorables aux étrangers qu’aux Américains, et ceux-là peuvent souvent, par un concours de circonstances fatales, tomber dans la plus grande misère. Il était donc tout naturel de songer à leur venir en aide, et sous ce rapport la colonie française de Californie s’est toujours fait remarquer au premier rang.

Telle est dans ses traits principaux la situation présente de la Californie. Quant à son avenir, on est en droit d’affirmer qu’il sera de plus en plus prospère. Si l’immigration californienne touche aujourd’hui à peu près à sa fin pour l’Europe, elle se poursuit toujours pour les États-Unis, et d’une façon très notable. On peut estimer à quinze mille individus environ le nombre des Américains qui s’établissent chaque année dans la Californie, et ce chiffre marquait en 1859 la différence entre l’immigration et l’émigration. La Californie joue pour les Yankees le rôle d’une véritable terre promise. Où retrouver ce climat exceptionnel, ces mines inépuisables, ces terres fécondes et plantureuses ? Des salaires encore privilégiés et même une fortune rapide y attendent l’immigrant sérieux. De faciles relations commerciales y sont ouvertes avec le monde entier, et si d’une part la Californie donne la main à, l’Australie, aux Indes anglaises et néerlandaises, à la Chine, au Japon, à tout l’archipel océanien, à toutes les colonies espagnoles du Pacifique, de l’autre elle est en communication journalière avec tous les états de l’Atlantique, du nouveau comme de l’ancien continent. Quelle situation géographique plus heureuse fut accordée à un état naissant ? quelle colonie rivale pourrait-on opposer à la jeune reine du Pacifique ? Et lorsque les progrès industriels que nous avons signalés dans le cours de cette étude seront en tout point accomplis, quand des lignes télégraphiques et ferrées relieront les deux Océans, y aura-t-il une contrée sur le globe appelée à un plus brillant avenir que l’état de Californie, cet état qui n’était hier encore qu’un pays d’aventuriers, peuplé de l’écume des autres nations ?

C’est son inébranlable attachement au gouvernement fédéral de Washington