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Si le travail en commun est la grande source du mal, n’en aggravons pas les effets par nos remèdes. La vapeur nous apporte forcément une sorte de communisme ; c’est assez de celui-là, prenons garde d’y ajouter celui de l’assistance. L’ouvrier ne s’appartient pas pendant les douze heures qu’il passe au service du moteur mécanique : qu’il soit du moins rendu à lui-même dès qu’il a passé le seuil de la manufacture, qu’il puisse être mari et père, qu’il sente sa volonté et son cœur.


II

Au nombre des institutions qui font un grand bien et ne peuvent faire aucun mal, il faut placer en première ligne l’association et l’épargne, parce qu’elles fondent la prospérité matérielle de l’ouvrier, et contribuent à son avancement intellectuel et moral ; mais au-dessus même de ces deux sources fécondes de moralisation et de bien-être, on doit encore mettre les écoles, parce qu’elles rendent complète l’émancipation de l’ouvrier, et tendent directement à le faire jouir de tous les avantages de la civilisation.

Nous avons vu, il y a quelques années, le principe de l’association invoqué et proscrit tour à tour avec une égale injustice. L’association n’est point applicable à toutes les fonctions sociales et ne peut pas guérir toutes les plaies ; mais il est désormais surabondamment prouvé en finances et en industrie que les plus grandes forces sont celles qui résultent du concours d’un grand nombre de petites forces, et que le plus grand banquier du monde est celui qui dispose de l’obole du prolétaire. Le développement de l’association est le correctif nécessaire de l’art. 745 du code civil, qui divise incessamment les héritages. L’une des causes de la supériorité industrielle de l’Angleterre, c’est qu’ayant moins besoin de recourir à l’association, elle la connaît cependant et la pratique mieux que nous. Il suffit d’ailleurs ici de considérer l’association dans son application la plus incontestée et la plus directement appropriée à l’extinction du paupérisme.

On a donné dans ces derniers temps une très vive impulsion aux