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A l’industrie forestière s’en rattacheraient quelques autres dont il est plus facile d’entrevoir que de préciser l’importance. On sait combien la végétation tropicale, où la sève déborde, est riche en résines, en gommes, en aromates. Déjà la sève de balata pénètre dans le commerce à côté du caoutchouc et de la gutta-percha, dont elle possède les propriétés combinées. Le quinquina, qui fut trouvé par l’académicien La Condamine, sur la rive droite de l’Amazone, dans des forêts pareilles à celles de la Guyane, existe très probablement dans ces dernières, où l’art pharmaceutique peut aussi recueillir la salsepareille, le baume de copahu, l’huile de carapa, que les Indiens mêlent à la pâte de rocou pour oindre leurs corps. La vannerie et la sparterie tireront parti des flancs et des matières textiles, dont ces mêmes sauvages tressent des filets et des hamacs estimés des Européens pour leur solidité.

Sans être plus utile, l’exploitation de l’or a plus de prestige, et la Guyane compte parmi ses meilleures chances la découverte de gisemens aurifères dans une partie de ses terrains. La tradition en avait de tout temps donné l’espoir, car c’est dans les profondeurs des forêts guyanaises, sur les bords du mystérieux lac Parima, qu’elle plaçait l’Eldorado, ce mirage ardent du XVIe siècle, et la science des Buffon et des Humboldt avait confirmé la probabilité de la présence de l’or par des aperçus pleins d’autorité. Des recherches commencées sur les indications de l’Indien Paoline donnèrent, il y a quelques années, à ce soupçon le caractère de la certitude, et dès 1857 une compagnie se forma, composée de la plupart des propriétaires et fonctionnaires de la colonie. Dans l’intention de dédommager ses membres des pertes que l’abolition de l’esclavage leur avait fait subir, un décret leur accorda un privilège d’exploration et d’exploitation, sur une étendue de 200,000 hectares, dans le bassin de l’Approuague, sans redevance pendant cinq ans. Au bout de cette période, un contrat définitif entre la compagnie et l’état devra régler les conditions de la colonisation agricole, autant qu’industrielle, de cette vaste possession. L’année suivante, la compagnie était constituée en société anonyme au capital de 20 millions, et se mettait à l’œuvre, sous la direction de M. le commandant Charrière, avec une résolution qui ne s’est pas un seul jour démentie et un succès qui va croissant d’année en année. En quatre années, de 1857 à 1860, la compagnie, avec un petit atelier de cent travailleurs, a récolté 179,209 grammes d’or dans ses quatre placers d’Aïcoupaïe, Madeleine, Counamaré, Chicdagom ; elle en a acheté aux indigènes qui cherchent l’or pour leur propre compte une quantité de 56,853 gr., ce qui fait, au prix de 3 francs le gramme, une valeur totale de 708,189 francs. La production varie, suivant les saisons pluvieuses