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malgré eux, ils seraient obligés d’être en même temps officiers ministériels et banquiers ; maison ne peut pas avoir un privilège de banquier, et cette situation complexe les expose aux plus grands dangers. On en trouve la preuve dans l’instabilité des offices, qui changent à chaque instant de titulaires, dans des déconfitures, pour nous servir du terme commercial, qui ont les plus désolantes conséquences. Néanmoins nous croyons que, sans sortir de l’esprit et du texte de la loi, on pourrait, avec l’article 90 du code de commerce, régulariser un nouvel ordre de choses qui satisferait à ce que réclament aujourd’hui les intérêts du public, sacrifiés à un monopole insuffisant. Pour l’intelligence de ce qu’on pourrait appeler une proposition de transaction, citons ce que dit l’article 90, au titre V du code de commercé : Il sera pourvu par des règlemens d’administration publique à tout ce qui est relatif à la négociation et transmission des effets publics. » Il s’agirait donc, on le voit, pour sortir de la situation illégale où sont les transactions financières et les intermédiaires de ces transactions, d’établir un ensemble de règlemens qui mît en quelque sorte d’accord les privilèges conférés par la loi et la liberté que réclament des intérêts considérables. En complétant le titre V du code de commerce conformément au vœu de l’article 90, on serait naturellement conduit à permettre le rétablissement du marché libre, dont la disparition a entraîné les agens de change dans des opérations qui leur sont interdites.

Le caractère officiel dont sont revêtus les agens de change ne souffrirait point de la part qui serait faite à la liberté. Les négociations auxquelles les parties doivent ou veulent donner le caractère d’authenticité attaché aux actes de l’autorité publique ne pourraient pas se passer de leur intermédiaire ; mais toutes les opérations qui entraînent des risques leur seraient défendues, comme elles le sont aux notaires[1]. Ainsi, pour ne parler que d’une question qui vient de se débattre avec un grand retentissement, il est certain que les prêts sur remise de titres déposés en compte courant ne pourraient pas être faits légalement par les maisons d’agens de change, et cependant la force des choses ne peut-elle pas les conduire à procéder dans ces transactions comme les banquiers eux-mêmes ? Mais si les banquiers prêtant à 5 pour 100 sur des dépôts de titres en compte courant ne peuvent immobiliser dans leurs caisses les titres qui leur sont remis, parce qu’ils ne retireraient aucun profit de cette opération, ce qui serait contraire à la constitution des maisons

  1. Voici ce que disait Regnault de Saint-Jean-d’Angély lors de la discussion de la loi, le 29 ventôse an XI : « Le gouvernement, a senti qu’il fallait des espèces de notaires commerciaux indiqués à la confiance des nationaux et des étrangers. »