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On peut dire de l’Italie en ce moment que, l’intérêt des questions auxquelles son sort est suspendu étant maintenant concentré à Paris, le petit courant des incidens qui peuvent se passer de l’autre côté des Alpes n’est guère de nature à commander notre attention. Les correspondances de Turin parlent beaucoup d’un prochain remaniement ministériel. La question de la composition du cabinet italien est, quant à présent, tout à fait lilliputienne. Qu’importe que les longues irrésolutions touchant le procès ou l’amnistie de Garibaldi aient été la cause de ce petit déchirement ministériel? Toutes les voix de l’Europe n’ont cessé de dire au gouvernement italien qu’il lui est impossible de mettre Garibaldi en jugement, et personne n’a cru un instant que le blessé d’Aspromonte pût subir une autre condamnation que celle que la fortune lui a infligée. Il est en tout cas un membre du ministère italien, le chef de l’instruction publique, qui ne se laisse point attarder par la dislocation du cabinet dans l’accomplissement de la réorganisation universitaire qu’il a entreprise, et qu’il poursuit avec une infatigable activité. M. Matteucci vient de publier le règlement général qui sera dans un mois appliqué aux universités du royaume d’Italie. Plusieurs points dans cette organisation nouvelle sont dignes d’attention. La pensée dominante est de réduire les seize ou dix-huit universités qui existaient dans la péninsule à un nombre plus restreint, à six, qui auront leur siège à Bologne, Naples, Palerme, Pavie, Pise et Turin. M. Matteucci établit à Pise une école normale supérieure semblable à la nôtre. Il veut que toutes les écoles de sciences naturelles aient des cabinets, des laboratoires, des collections où, en alternant avec les leçons, les élèves soient tenus de travailler trois fois par semaine. Il n’y aura plus dans toute l’Italie que six commissions d’examen pour l’épreuve du doctorat; l’Italie sera divisée en six circonscriptions, et les élèves iront prendre leurs degrés au siège de la commission dans la circonscription où sera leur résidence. On comprend l’utile économie de cette mesure lorsque l’on sait que l’ancien régime universitaire employait huit cents examinateurs, tandis que cent suffiront avec le nouveau système, ce qui permettra de réunir plus facilement des examinateurs consciencieux et capables. Nous signalerons encore une disposition du plan de M. Matteucci qui nous paraît surtout digne d’éloges. Il y aura chaque année, dans les grandes universités, un concours spécial entre les jeunes docteurs, et les prix du concours seront des pensions temporaires allouées aux lauréats, afin de leur permettre de poursuivre leurs études en Italie ou à l’étranger. On pourra mériter ces pensions soit par des mémoires publiés, soit pour avoir pendant une année professé un cours libre à la façon des privat docent des universités allemandes. Ces mesures nous paraissent inspirées par un sentiment éclairé et libéral des intérêts de l’instruction publique en Italie, et assureront, nous n’en doutons pas, à M. Matteucci les suffrages de l’Europe savante.

Le conflit qui s’est élevé entre le gouvernement et le parlement à Berlin à propos de la nouvelle organisation militaire a déterminé la retraite de