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trême. L’importation des produits de fabrique anglaise, qui en 1785 n’avait été que de 6 millions de francs, dépassa en 1787 18 millions, en 1788 10 millions, et dans cette dernière année la balance commerciale entre les deux nations fut, au profit de l’Angleterre, de 30 millions de francs; mais, sur 60 millions de francs qu’elle expédia en France, il y avait pour 19 millions de francs environ de houille ou de matières premières dont profitèrent les manufactures françaises, et il est probable que, les produits de ces dernières se perfectionnant et se vendant à meilleur compte par l’effet de la concurrence, et d’un autre côté l’engouement des premiers jours venant à passer, le niveau eût fini par s’établir. Du reste, la révolution française et la guerre qui en fut la suite survinrent trop tôt pour que, d’après ces premiers résultats, il soit permis de préjuger les conséquences économiques que le traité aurait pu avoir définitivement pour les deux nations. Nous croyons cependant avec Pitt que, si les relations pacifiques entre elles eussent été renouées plus tôt, il se serait établi une fréquentation et des rapports d’intérêts qui eussent amené une émulation salutaire, et que probablement elles ne se seraient pas bornées à se faire un emprunt réciproque de leurs goûts, de leurs mœurs, de leur esprit et de leurs arts industriels. L’exemple d’une vie politique alors dans tout l’éclat de son développement en Angleterre eût peut-être exercé une heureuse influence sur le choix et la pratique des institutions que cherchait à se donner la France, et la liberté eût pu y être fondée avec un concours de forces et des garanties qui lui ont manqué depuis lors.

Peu de jours après l’adoption du traité de commerce, Pitt proposa à la chambre des communes une mesure financière depuis longtemps réclamée, celle de la révision de la législation et des tarifs de douane, d’excisé et de timbre. L’état existant donnait lieu aux plus légitimes réclamations : c’était un véritable chaos, source d’abus de perception aussi préjudiciables pour le trésor que pour le contribuable. Pitt résolut d’y mettre un terme, et, parmi toutes les réformes entreprises sous son administration, il n’en est pas qui ait été plus utile, mieux élaborée, accueillie avec une faveur plus générale et menée à meilleure fin. Le bill de consolidation est encore aujourd’hui une des bases principales du système financier de l’Angleterre.

Ainsi que l’on a déjà eu l’occasion de le dire, tous les emprunts contractés avaient été garantis par la création de taxes dont le produit leur était spécialement affecté, et d’autres avaient été aussi établies pour faire face à l’accroissement des dépenses publiques. Plusieurs d’entre ces taxes, bien que le mode d’assiette en fût différent, portaient sur les mêmes articles, qui se trouvaient ainsi im-