Page:Revue des Deux Mondes - 1864 - tome 51.djvu/410

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

Nombre de personnes compromises par leur fidélité à la cause de l’Angleterre avaient pendant la guerre d’Amérique éprouvé des pertes considérables, soit dans leur revenu, soit dans leur propriété. Leurs intérêts avaient été recommandés, par une des clauses du traité de paix, à la sollicitude des législatures des divers états américains; mais cette recommandation n’avait été qu’une affaire de forme, et aucune de leurs demandes n’avait été accueillie. Les réclamans s’étaient donc adressés au gouvernement anglais, et leurs plaintes avaient été soumises à l’examen de plusieurs commissions d’enquête. En droit strict, ils n’avaient rien à prétendre; mais au point de vue de l’équité ils avaient des titres sérieux à la générosité de l’Angleterre, et déjà 500,000 livres sterling leur avaient été distribuées. Ces titres cependant n’étaient pas les mêmes pour tous : ils devaient varier suivant la position des pétitionnaires, la nature et l’étendue des pertes éprouvées. Il y avait encore une autre dette du même genre à liquider : il s’agissait des colons de la Floride orientale qui, à la suite de la cession de ce territoire par l’Angleterre à l’Espagne, avaient dû abandonner leurs habitations ou propriétés. Ils sollicitaient aussi des dédommagemens, et leur demande était d’autant plus légitime qu’ils étaient victimes d’un acte parfaitement volontaire du gouvernement anglais. Pitt fut d’avis de les indemniser complètement, d’allouer à cet effet une somme de 113,952 livres, et, quant aux loyalistes, il proposa de les diviser en trois catégories, et de répartir entre eux, indépendamment de ce qu’ils avaient déjà reçu, une somme de 1,228,239 livres sterl. Certes on ne pouvait qu’approuver le sentiment qui faisait reconnaître une pareille dette; mais Pitt dut se préoccuper de la situation du trésor et rechercher le moyen de rendre pour lui cette nouvelle charge moins onéreuse. En conséquence il proposa de l’acquitter par à-comptes avec des obligations portant intérêt à 3 1/2 pour 100, et remboursables successivement avec les bénéfices d’une loterie. Ce plan fut accepté par le parlement, et ainsi se trouva liquidée à la satisfaction de tous les Intérêts une dette qui, sans être obligatoire, n’en était pas moins sacrée.

Il y avait une denrée qui, depuis l’application des nouvelles mesures relatives au thé, au vin et aux esprits, était devenue l’objet principal de la contrebande : c’était le tabac. Le prix d’achat au lieu de production ne dépassant pas 3 deniers par livre, et le tarif étant de 14 deniers, il y avait entre les deux chiffres une marge trop grande pour ne pas encourager la fraude. Ainsi sur 12 millions de livres de tabac consommés annuellement en Angleterre, 7 millions seulement acquittaient les droits, et il y avait pour le trésor une perte annuelle de 300,000 livres sterl. Pitt pensa que le meilleur moyen de mettre un terme à ce trafic préjudiciable était de con-