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intérêts. Néanmoins des événemens imprévus pouvaient occasionner des dépenses extraordinaires; mais c’était là une exception regrettable que l’urgence pouvait seule justifier. Or le subside avait été promis avant la clôture de la dernière session, et, en ne le soumettant pas alors à l’approbation du parlement, les ministres avaient voulu établir un précédent inconstitutionnel, et se donner ainsi à l’avenir la facilité de dépenser les deniers du pays sans l’assentiment préalable de ses représentans. Il proposa donc de déclarer que par cette conduite ils avaient violé le privilège de la chambre et engagé leur responsabilité personnelle.

Pitt reconnut comme Fox, et en termes non moins formels, le droit exclusif de la chambre des communes de voter les recettes et les dépenses de l’état. Néanmoins il était parfois dangereux de porter à l’excès la rigueur des principes. En examinant les précédens parlementaires, on verrait que l’application en avait été subordonnée maintes fois aux circonstances. Ainsi, pour ne point arrêter la marche du gouvernement, il avait été admis qu’en cas de besoins imprévus les ministres auraient la faculté d’y pourvoir sous leur propre responsabilité, et lors de l’administration de M. Fox lui-même il avait été fait pendant les sessions des dépenses extraordinaires considérables qui ne furent approuvées et régularisées que dans les sessions suivantes. Sans aucun doute, lorsqu’une dépense de cette nature pouvait être prévue, elle devait, avant la mise à exécution, être autorisée par le parlement ; mais, si la divulgation en offrait des inconvéniens, le gouvernement ne devait pas hésiter à la faire et à la tenir secrète, sauf à la soumettre plus tard à la sanction législative. Tel était le cas dans lequel s’était trouvé le cabinet pour le subside donné à l’empereur d’Autriche. La situation de ce souverain était désespérée, et il fallait à tout prix lui venir en aide; la publicité donnée à ce concours aurait pu avoir, politiquement et financièrement, les conséquences les plus fâcheuses, et ces graves motifs avaient déterminé la conduite du cabinet. Quelques membres, il est vrai, tout en reconnaissant la nécessité dans certaines circonstances de procéder sans vote préalable du parlement, en contestaient cependant la faculté quand il s’agissait de troupes étrangères; mais l’histoire et le journal de la chambre des communes témoignaient du contraire. Ainsi en 1701, sous le roi Guillaume, en 1706 sous la reine Anne, en 1718 sous le roi George Ier en 1734 et 1742 sous George II, des subsides avaient été payés à des souverains étrangers sans avoir été accordés par la chambre des communes, et postérieurement, après en avoir reconnu l’utilité, cette dernière avait donné au gouvernement un bill d’indemnité. Le cabinet, dans les circonstances actuelles, ne s’é-