Page:Revue des Deux Mondes - 1864 - tome 52.djvu/1014

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

de la seconde chambre au budget de la guerre. Le budget n’étant pas voté, M. de Bismark ne s’est pas troublé pour si peu. Il a perçu les impôts conformément au budget de l’année antérieure ; mais en agissant ainsi il avait le désagrément de violer la constitution, il a eu en outre l’ennui de dissoudre la chambre ; enfin il a pris le parti de ne la point rassembler. Instruit par les difficultés que M. de Bismark avait rencontrées sur son chemin, le prince Couza a pris ses précautions dans son statut même. « Si le budget, dit l’article 6, n’est pas voté en temps opportun, le pouvoir exécutif pourvoira au service public conformément au dernier budget voté. » Ce simple article rend complètement illusoire le contrôle des représentans du pays en matière de finances. Si une opposition s’élève contre le budget, l’hospodar n’a qu’à congédier l’assemblée et à dire que le budget n’a pas été voté. Il n’est pas sans intérêt, dans les circonstances actuelles, de remarquer le pouvoir que l’hospodar s’arroge ainsi sur les finances. Le prince Couza veut contracter un emprunt ; il a la prétention de fonder son crédit sur les grands marchés de l’Europe occidentale. Les finances roumaines présentent un déficit que ne peuvent combler les rentrées naturelles de l’impôt : de là la nécessité d’émettre un emprunt roumain ; mais c’est ici probablement que l’hospodar rencontrera un écueil dans le pouvoir qu’il s’est adjugé pour la perception de l’impôt. Les capitaux qui se placent en fonds publics sont amateurs des finances contrôlées par des chambres, et n’aiment point, en matière de budget, les procédés arbitraires du pouvoir absolu. Que le prince Couza ajourne la solution de la question des paysans, qu’il supprime des journaux, qu’il enlève leurs organes à des hommes qui défendaient la nationalité roumaine et que connaissait la France libérale, tels que MM. Rosetti et Bratiano, avant qu’il n’eût lui-même un nom dans son pays ; mais nous ne lui conseillons pas de venir frapper en autocrate aux portes des bourses européennes.


E. FORCADE.


LES INSTITUTIONS DE CREDIT POPULAIRE EN FRANCE ET EN ALLEMAGNE[1]


Des problèmes sociaux qui, depuis de longues années déjà, avaient disparu de l’ordre du jour des discussions publiques commencent à préoccuper de nouveau l’opinion. Le calme qui s’est fait dans les esprits permet d’aborder aujourd’hui de sang-froid des questions qui jadis surexcitaient les passions populaires. On se rappelle la vogue qu’avaient, après la révolution de 1848, les mots magiques d’associations ouvrières et d’organisation du travail. C’est l’honneur des économistes de n’avoir pas abdiqué alors en présence de l’entraînement des uns, de l’affaissement des autres. C’est leur

  1. Le Crédit populaire, par M. A. Batbie, 1 vol. in-18, Paris 1864, Cotillon et Guillaumin.