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favorisait leur multiplication dans une contrée peu habitée, mais parcourue par de grands troupeaux de moutons mal gardés et mal défendus. En Algérie, les grands destructeurs de lions, ce sont les Français. En résumé, l’unité zoologique de la région méditerranéenne est aussi évidente que l’unité botanique, et, en soutenant cette thèse, je suis heureux de m’appuyer sur l’autorité d’un savant trop modeste, le docteur Lartet, continuateur autorisé de ces études paléontologiques à la fois rigoureuses, sagaces et hardies, dont Cuvier, Laurillard et de Blainville nous ont laissé le modèle.

La santé de l’homme est le reflet du milieu où il vit, et ses maladies varient suivant les causes qui les produisent. La région méditerranéenne différant de l’Europe moyenne par le climat, la constitution physique du sol, la flore et la faune, les maladies dont les peuples méditerranéens sont affectés doivent différer et diffèrent en effet de celles des contrées océaniennes. L’influence de la race vient s’ajouter aux agens extérieurs : c’est la race latine qui domine sur les rivages de la Méditerranée, et l’Arabe lui-même tire son origine de la contrée asiatique la plus rapprochée de l’Afrique. Enfant du désert, il s’est avancé d’orient en occident dans ces vastes régions inhabitées où son humeur nomade ne rencontre pas de barrières et où la terre appartient à celui qui l’occupe. Hippocrate, le père de la médecine, a tracé le tableau des maladies de la région méditerranéenne. Les maladies de la Grèce antique sont encore celles de toute cette région. C’est dans les observations prises en Afrique par nos médecins militaires que le savant commentateur d’Hippocrate, M. Littré, a trouvé le portrait le plus ressemblant des maladies hippocratiques. C’est également la raison d’être de l’école de médecine de Montpellier : placée au centre d’une région médicale différente de celles des écoles de Paris et de Strasbourg, elle étudie des formes de maladies rares ou inconnues dans le nord. Aussi les médecins de nos armées de terre et de mer, que les nécessités du service appellent presque toujours dans des contrées plus chaudes que la France septentrionale, retrouvent-ils dans ces pays, et spécialement en Algérie, toutes ces affections intermittentes, bilieuses et dyssenteriques, qui forment le trait dominant de la nosologie méditerranéenne. Observant d’autres maladies, de même que le météorologiste observe un autre climat, le botaniste d’autres plantes et le zoologiste d’autres animaux, le médecin de Montpellier se rattache à une doctrine médicale différente de celle de Paris et des écoles du nord de l’Europe. Constatant chaque jour l’influence prodigieuse de l’air, de l’eau et des lieux, il admire Hippocrate et inscrit sous son buste cette épigraphe légèrement ambitieuse : Olim