Page:Revue des Deux Mondes - 1864 - tome 52.djvu/449

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

prises par M. Coronéos fut-il immédiat, et, bien qu’une amnistie soit venue depuis lors l’affaiblir, on n’a plus vu se produire aucun acte grave d’indiscipline.

Par malheur l’état de l’assemblée d’Athènes, partagée en deux camps d’égale force, rendait impossible à un cabinet d’opinion tranchée de s’affermir et de durer. N’ayant pas une majorité parlementaire assurée, le ministère Canaris ne vivait qu’avec difficulté, tantôt vainqueur et tantôt vaincu dans les luttes qui se renouvelaient chaque jour au sein de la constituante. Ces luttes prirent un caractère plus violent une fois que le traité d’union des Iles-Ioniennes eut été signé, et qu’il s’agit de régler le mode d’élection des représentons que ces nouvelles provinces enverraient à l’assemblée. Le roi avait mandé à Athènes les principaux membres de la chambre septinsulaire, M. Padovan, de Corfou, M. Miliarésis, de Céphalonie, M. Lombardos, de Zante, et M. Valaoritis, de Sainte-Maure ; dans leurs conférences avec le comte de Sponneck et les ministres avait été arrêté un plan d’après lequel les Iles-Ioniennes devaient avoir quatre-vingt-quatre représentans qui entreraient dans la constituante après avoir procédé eux-mêmes séparément à la vérification de leurs pouvoirs. le parti révolutionnaire fut exaspéré de voir qu’une aussi large part allait être faite aux députés ioniens, dont il craignait l’esprit conservateur, et il résolut d’engager une bataille décisive qui fît échouer le plan ministériel. Le prétexte choisi fut l’ingérence du comte de Sponneck dans cette affaire, ingérence que les plus fougueux orateurs de la gauche dénoncèrent à la tribune comme inconstitutionnelle ; ils allèrent même jusqu’à proposer un décret d’expulsion contre le conseiller du roi. Cette proposition fut rejetée ; mais trois jours après, une partie des voix flottantes ayant opéré leur mouvement de bascule habituel, 124 suffrages contre 123 en portèrent l’auteur, M. Déligeorgis, à la présidence de l’assemblée. Le ministère donna sa démission ; néanmoins, avant de quitter les affaires, il voulut compléter sa tâche en faisant voter la loi sur les élections des Iles-Ioniennes. On pouvait craindre qu’elle ne fût rejetée et qu’il ne sortît de là des difficultés qui auraient retardé pour longtemps encore l’union septinsulaire ; mais le peuple d’Athènes, perdant patience et traitant les révolutionnaires avec les armes révolutionnaires, intervint dans le débat. Le jour où la discussion devait avoir lieu, il se porta en masse au palais de l’assemblée, et, obstruant toutes les issues, déclara qu’il ne laisserait pas sortir les représentans que la loi n’eût été votée conformément au plan des ministres et au désir du roi ; le courage des jacobins d’Athènes ne tint pas devant cette manifestation populaire, et le, projet fut adopté à l’unanimité. L’amiral Canaris et ses collègues persistant à se retirer