Page:Revue des Deux Mondes - 1864 - tome 52.djvu/457

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

dans l’état présent à peine 500,000 drachmes sont dépensées utilement, mais qui dès lors s’emploieraient en travaux de chemins et en autres améliorations sous le contrôle jaloux des habitans, tous intéressés à ce que ces revenus servent au progrès et au bien-être de la commune ; au point de vue moral et politique, elle ne serait pas moins heureuse en donnant au pays une plus large part dans l’administration de ses affaires.

C’est là le grand but à poursuivre en Grèce, car l’intervention directe et réelle du pays y a toujours produit les résultats les plus heureux. Une expérience de vingt ans a prouvé que les seules communes florissantes et possédant des chemins vicinaux sont celles qu’un heureux oubli de l’administration a laissées entièrement à elles-mêmes. Il n’est pas moins certain que, dans un ordre plus élevé, l’ingérence du gouvernement dans les élections politiques a profité seulement aux aventuriers, tandis que, toutes les fois que la population, demeurée libre de ses choix, s’est intéressée aux opérations électorales, elle a nommé de moins beaux parleurs peut-être, mais des députés capables et conservateurs. Par malheur ce dernier cas s’est présenté rarement ; le régime constitutionnel, concentré dans les intrigues et les rivalités d’un petit nombre d’hommes, n’a pas encore eu en Grèce une existence véritable. Il faut évidemment qu’une telle situation finisse, car, si elle se prolongeait, elle n’aurait que deux issues également fâcheuses, dont la seconde est peut-être en ce moment plus à craindre que la première : ou bien, les choses continuant à suivre la même marche ; tout gouvernement deviendrait impossible, et la Grèce tomberait dans une incurable anarchie, ou bien le pays, lassé de ces agitations stériles, renoncerait au régime constitutionnel, dont il n’a en rien profité, abdiquerait entre les mains d’un seul homme, du roi ou d’un autre, et se réfugierait dans la dictature pour y trouver du moins la tranquillité.

Mais là ne doit pas se borner la tâche de la royauté. La lèpre du fonctionnarisme, introduite par la régence bavaroise comme un moyen de domination par l’abaissement des caractères, ronge la Grèce. Le royaume hellénique a sept ministres, plus de cent députés, plus de soixante sénateurs, qui en ce moment sont remplacés par trois cents représentans à la constituante, dix préfets, quarante-neuf sous-préfets, vingt-quatre archevêques et évêques payés sur le budget, une cour de cassation appelée aréopage, trois cours royales, dix tribunaux de première instance, deux cent soixante-dix-huit juges de paix, des ministres plénipotentiaires, des consuls, et au-dessous une armée de plus de six mille employés inférieurs. N’est-ce pas une charge effroyable et hors de toute proportion sensée pour un petit état qui n’égale pas en population et en ressources notre