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part que nous pouvions y prendre ; des faits récens ou prochains nous fournissent l’occasion d’y revenir avec plus de détails.

Sur tous les points du globe propres à la culture du coton, l’élévation des prix a déterminé un mouvement naturel de production, auquel l’Angleterre a prêté son appui par l’envoi de nombreux agens, par une distribution judicieuse de ballots de semences et d’engins, perfectionnés. Non-seulement le coton a reparu sur des terres que la rivalité américaine avait pour ainsi dire désarmées, mais il s’est introduit dans des contrées qui étaient jusqu’alors restées étrangères au traitement de la plante et aux échanges dont elle est l’objet. Toute l’Asie équinoxiale a fourni son contingent, depuis l’Inde, où les cultures ont pris un développement vigoureux, jusqu’à la Chine, qui, venue en ligne plus tard, a, dès la première campagne, montré une grande puissance. Le Brésil a suivi l’élan, la Jamaïque s’y est associée ; il n’est pas jusqu’aux côtes de l’Afrique qui n’aient été témoins de quelques essais, à Lagos et au Port-Natal. Plus près de nous, presque à nos portes, cette révolution dans les cultures a pris des proportions qui étonnent, et c’est à quoi je m’attacherai surtout comme élément de comparaison. Le bassin de la Méditerranée est notre vrai domaine, à la fois continental et colonial. Comment les rôles se sont-ils distribués entre les riverains ? Le plus brillant ne nous est pas échu. L’activité s’est montrée plus sérieuse là où la civilisation peut passer pour inférieure. Toutes les régions levantines, où l’exploitation du sol est arriérée, où les procédés restent informes, ont pris dans l’approvisionnement une place qu’on ne pouvait attendre ni de leur apathie naturelle, ni de leurs institutions énervantes. L’Égypte, qui en 1859 fournissait à peine 60,000 balles de coton à nos marchés d’Europe, en a livré 230,000 en 1863, en livrera 300,000 en 1864. L’Anatolie et la Syrie, réduites naguère à une production insignifiante, en sont arrivées à 100,000 balles, la Roumélie et les Dardanelles à un chiffre équivalent ; Chypre et l’Archipel, la Grèce et ses annexes s’éveillent et prennent leur rang. Moscou tire du Caucase 10 millions de kilogrammes ; les Deux-Siciles et Malte ont pu récolter, presque du premier jet, 50,000 balles de cotons d’un poids analogue et d’une qualité presque égale a ceux de la Louisiane. Récapitulation faite, c’est un bloc de 600,000 balles qui, de tout le circuit du bassin, est venu diminuer les vides de nos entrepôts.

Voilà le lot des productions rivales : quel a été le nôtre ? Nous en sommes, pour l’Algérie entière, à 4,000 balles ! Non-seulement, depuis les événemens d’Amérique, les quantités n’ont point augmenté, elles ont décru. Il est facile de s’en convaincre par le rapprochement des surfaces exploitées d’année en année, à partir de