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triés parmi de nombreux candidats, composaient, avec trois Indiens, tout le personnel. Les chevaux et les voitures avaient été soigneusement choisis ; des approvisionnemens de tout genre étaient préparés pour suffire à un voyage de dix-huit mois. Les ressources considérables dont le comité disposait permirent d’équiper largement cette petite troupe, dont on attendait de grands résultats ; aussi ce fut un événement public que de la voir défiler dans les rues de Melbourne le 20 août 1860, jour de son départ. Il avait été convenu qu’elle se rendrait vers la Rivière-Cooper, où elle établirait un dépôt de vivres, et qu’ensuite elle se dirigerait vers le golfe de Carpentarie. On fut longtemps sans entendre parler de l’expédition. Onze mois seulement après son départ, le bruit se répandit à Melbourne que plusieurs hommes de l’escorte étaient morts du scorbut, et que MM. Burke et Wills, qui s’étaient engagés seuls dans l’intérieur, en emportant des provisions pour trois mois seulement, n’avaient pas encore reparu. Voici ce qui était arrivé.

La marche avait été très lente entre Melbourne et la Murray, et de cette rivière jusqu’au Darling. L’immense quantité de provisions que l’on emportait pour former un dépôt permanent retardait le convoi. Les chameaux étaient indisciplinés et difficiles à diriger. De plus, Burke, avec un caractère raide et ombrageux, s’était aliéné, paraît-il, l’esprit de ses inférieurs, et plusieurs d’entre eux l’abandonnèrent à Menindie, dernière station habitée sur le Darling, à 600 ou 700 kilomètres de Melbourne. Avant de quitter ce camp, la troupe fut reconstituée et s’adjoignit un nouvel officier, M. Wright, bushman expérimenté. Plusieurs hommes et une partie des chameaux furent laissés en arrière avec l’excédant de bagages qui alourdissait la marche. On repartit le 19 octobre, et sans autre accident on arrivait à la Rivière-Cooper le 20 novembre. C’était plus que la moitié du trajet total entre Melbourne et le golfe de Carpentarie, mais c’était la moitié la plus facile, puisque le pays était déjà connu ; d’ailleurs l’été était commencé, saison peu favorable pour s’engager dans une contrée déserte où l’on devait craindre la sécheresse. Effectivement, en se dirigeant vers le nord et le nord-ouest, on retombait sur le désert pierreux de Sturt et sur les dunes de sable dont ce voyageur avait fait une peinture si désolante. Wills s’avança seul dans cette direction avec trois chameaux, fit 140 kilomètres sans trouver de l’eau, et revint au campement avec beaucoup de peine. Encouragé quelques jours plus tard par de fortes pluies qui avaient dû rendre le terrain plus praticable, Burke se résolut à marcher au nord, en laissant en arrière une partie de ses hommes. Il partit avec Wills, un ancien soldat, King, et un colon, Gray, qu’il avait recruté à Menindie. Il emmenait six chameaux et