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CHRONIQUE DE LA QUINZAINE.



14 août 1865.

Le fait politique important du moment, nous ne nous lasserons point de le répéter, c’est le réveil de l’esprit de spontanéité et d’initiative au sein du pays. Voilà le curieux travail que révèlent les élections significatives, celles qui se produisent dans les milieux vraiment actifs et vivans. Les seconds tours de scrutin pour les élections municipales ont confirmé nos appréciations sur les tendances de l’opinion. Ces seconds tours ont été favorables à l’union libérale, c’est-à-dire au mouvement d’opinion qui veut sincèrement rétablir, comme on l’a dit, la pyramide sur sa base, en d’autres termes faire partir du corps électoral l’inspiration et les directions qui doivent conduire le pouvoir politique et administratif. Ce qui surprend au premier aspect, c’est que ce réveil de l’esprit public ait pu se produire en l’absence de ces libertés politiques que M. Thiers a si heureusement appelées les libertés nécessaires, sous un régime de restrictions qui annulent le droit de réunion, et qui enlèvent à la presse la première vertu de la fonction qu’elle est appelée à exercer dans les sociétés modernes, qui est de fournir aux citoyens un moyen facile et rapide de concert et d’action commune. Il s’est fait là, tandis que peu de gens y songeaient ou le prévoyaient, une sorte de travail instinctif, sourd, latent. Ainsi commence le progrès d’une réaction inévitable et irrésistible. C’est de cette façon qu’agissent les lois de la nature, inflexibles et silencieuses, sans avoir besoin d’aide et sans céder aux obstacles. Qu’on en prenne donc son parti : s’il y a eu excès dans les privilèges et les prérogatives que le pouvoir s’est donnés en France depuis quatorze ans, le pays commence à ressentir cet excès ; l’opinion publique, manifestée par les élections, semble dire que le tour de la liberté est enfin venu, et que ce n’est plus maintenant au pouvoir de faire des conquêtes.

Ce qui nous plaît dans cette évolution libérale, c’est qu’elle n’a rien d’orageux, rien d’inquiétant, et que, pour parler trivialement, elle com-