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des écoles spéciales. L’ensemble des connaissances humaines y est représenté avec un point de départ commun, le commerce familier de l’antiquité. C’est la force et la raison d’être de ces collèges supérieurs ; ils ne courent pas après le nombre ; leur objet est rempli si l’élite leur reste. Ce qu’ils dispensent surtout, c’est ce fonds d’instruction qui est la substance et l’ornement des esprits cultivés et accompagne l’homme dans toutes ses destinations. Les méthodes ont surtout en vue une préparation sérieuse où la réflexion concourt avec la mémoire à bien fixer le sens des leçons et à exercer le jugement dans les commentaires qui en découlent. Il n’y a pas seulement des cours dont l’effet se perd quand l’attention est distraite, mais de véritables classes qui exigent un travail personnel et des essais de composition. Chaque étudiant y est interrogé à son tour ; il lit et explique les auteurs, répond aux objections, discute ce qui est douteux, éclaircit ce qui est obscur, pose et soutient des thèses à mesure que le sujet lui en fournit. Le maître est là moins pour interrompre que pour écouter ; quelquefois il suscite des controverses d’élève à élève de manière à les redresser l’un par l’autre en se réservant le dernier mot sur le débat. On comprend ce que ces exercices ont de favorable au développement des intelligences. L’habitude du raisonnement, s’acquiert ainsi dès l’âge qui est celui des élans irréfléchis ; l’enfant apprend à mesurer et à peser ses paroles, à leur assigner un ordre, à leur donner quelque valeur ; il apprend à exposer ses idées, si superficielles qu’elles soient, à garder sa présence d’esprit devant un auditoire où il a des censeurs dans ses égaux. Il n’est pas jusqu’au choix et à la propriété de l’expression qui ne soient de rigueur dans ces épreuves, et ne marquent, de classe en classe, le degré d’avancement. On s’étonne quelquefois des dispositions qu’ont les Anglais pour les joutes de la vie publique, dans lesquelles ils se montrent rarement hésitans et embarrassés. Ces improvisations sont pour nous des corvées ou une grâce d’état ; pour eux, c’est un jeu, et du plus au moins tout le, monde y est propre. C’est dans les écoles, et au moment où le cerveau reçoit ses premières façons, qu’ils en acquièrent le don et en, prennent le goût. On leur enseigne dès lors deux choses qui s’éloignent du dialogue décousu que préfère notre verve gauloise, l’art de développer leurs idées, et, ce qui est plus rare, l’art de savoir écouter.

L’accès de ces collèges et de ces universités est libre pour toutes les classes de la communauté ; seulement la distinction des rangs y est maintenue. Un collège est l’Angleterre en miniature. Dans les classes, l’enseignement est commun, ce qui est également commun, c’est l’obéissance à la discipline. Le régime est un moyen terme