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kilogrammes tous les ans, et pourtant c’est à peine si l’on commence à se faire une idée des masses énormes de coton que pourraient fournir les États-Unis. Ainsi M. Atkinson, l’économiste qui a le mieux traité ces questions, nous apprend que la quantité de terrain cultivé en coton n’a jamais dépassé 1 et 7 dixièmes pour 100 de l’étendue des terres qu’on pourrait consacrer à ce produit.

La question des futurs approvisionnemens de coton ne dépend pas non plus nécessairement de l’activité que pourront déployer les nègres. C’est un fait établi que dès l’année 1850 un neuvième de la récolte avait été produit par des mains libres. On n’ignore pas que depuis cette époque l’emploi des travailleurs salariés a été en augmentant, et que les colons allemands du Texas occidental ont parfaitement réussi dans leurs cultures. Déjà nous voyons se porter des états du nord vers les états du sud une émigration dont le succès ne fait pas le moindre doute. L’armée fédérale ayant été licenciée, de nombreux soldats iront établir leurs foyers sur ce sol plus fertile, et feront preuve, pour les travaux de la paix, de la même énergie que sur le même théâtre ils ont déjà déployée dans les célèbres campagnes de Grant et de Sherman. La société d’émigration de la Nouvelle-Angleterre[1], grâce à laquelle, après une lutte sanglante et désespérée, le Kansas a été colonisé, organisé et finalement gagné à la cause de la liberté, se prépare à coloniser les états du sud comme elle a déjà colonisé les territoires de l’ouest. Partout où se présentent les vaillans fils de la Nouvelle-Angleterre, ils s’entourent de leurs écoles libres et de leurs églises, et portent avec eux le suffrage universel, l’ordre, l’industrie et la sobriété, toutes choses tendant à produire la richesse, qui est le nerf d’un état.

Il est facile de juger des avantages du travail libre sur le travail servile en comparant le Maryland, un des états à esclaves les plus favorisés, au Massachusetts ; un des états libres les plus prospères. Le Maryland offre une superficie de 28,811 kilomètres carrés, supérieure de 8,600 kilomètres à celle du Massachusetts. Le Maryland a une longueur de côtes fluviales et maritimes de 2,150 kilomètres, et le Massachusetts de 1,229 seulement. Le Maryland possède un domaine agricole double en étendue de celui qui appartient au Massachusetts. La nature a donc éminemment favorisé le Maryland. Voyons maintenant ce que nous dit la statistique. En 1860, la mortalité dans le Massachusetts était de 1 sur 92, dans le Maryland de 1 sur 52. La production du Massachusetts était évaluée à 1 milliard 550 millions de francs, celle du Maryland à 356 millions. Le revenu par tête était de 1,269 francs dans le Massachusetts, et de 518 fr. dans le Maryland, moins de la moitié. Au Massachusetts, la propriété tant mobilière qu’immobilière était évaluée à 4 milliards 401 millions, dans le Maryland à 2 milliards

  1. The Emigrant Aid Society.