Page:Revue des Deux Mondes - 1866 - tome 64.djvu/520

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.


CHRONIQUE DE LA QUINZAINE.



14 juillet 1866.

Nous n’avions point pris une précaution inutile en déclarant, au moment où les opérations actives commençaient entre la Prusse et l’Autriche, que la guerre imposait silence aux conjectures, et nous livrait aux surprises et aux coups de théâtre. Les coups de théâtre n’ont point manqué depuis quinze jours. Nous en avons eu de militaires et de diplomatiques. Une de ces batailles formidables qui prononcent les arrêts irrévocables de la force sur la destinée des empires a été livrée en Bohême. La bataille de Sadowa a révélé la puissance militaire de la Prusse, et a porté un coup peut-être irréparable à la puissance politique de l’Autriche, Nous avons appris par une découverte soudaine la terrible efficacité du fusil à aiguille; nous avons été instruits surtout de l’unité de pensée et de la vigueur d’action avec lesquelles la politique prussienne est capable d’exécuter ses desseins. Au plus fort de l’émotion excitée chez nous par les péripéties de la guerre de Bohême, nous avons été saisis par une diversion diplomatique étrange qui a violemment emporté dans une autre région les idées et les espérances. On se crut touché par une baguette de magicien quand le Moniteur nous annonça la cession de la Vénétie à l’empereur des Français et la médiation de la France invoquée par l’Autriche. On crut voir là pour la France le couronnement victorieux d’une politique habilement temporisatrice. Nous semblions recueillir le glorieux prix de notre savante et profonde neutralité. La France n’avait pas seulement conservé la paix pour elle-même, elle allait la rendre à l’Italie et à l’Allemagne en terminant la question italienne, en présidant aux arrangemens nouveaux de la vaste agglomération germanique. Avec cette naïveté généreuse du patriotisme qui nous fait volontiers croire à la suprême influence de la France, Paris salua ce changement à vue en se pavoisant et s’illuminant; mais ce n’était point la dernière sur-