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le gaz nous le refroidissons, sa pression va diminuant d’un 273e pour chaque degré. Si nous pouvions arriver à — 273 degrés, le gaz n’aurait plus aucune pression, il ne serait plus qu’un amas inerte de molécules dénuées de toute force vive. C’est ce qu’on a appelé le zéro absolu de température. Il y a là une sorte d’état limite auquel on ne peut point parvenir dans la pratique, et où tout mouvement moléculaire serait éteint.

Nous venons de considérer une certaine masse d’air, et nous avons supposé que nous réchauffions d’un degré en lui permettant de se dilater de telle sorte que la pression restât constante ; nous avons ensuite supposé que nous réchauffions d’un degré en l’obligeant à ne pas changer de volume. Faudra-t-il, dans les deux cas, pour produire cette même élévation de température, une même quantité de chaleur ? évidemment non. Sous volume constant, l’air n’a aucun travail extérieur à accomplir. Sous pression constante, il faut qu’il déplace l’obstacle extérieur qui s’oppose à sa dilatation ; il a ainsi un véritable travail à produire. Dans ce second cas, il doit absorber un excédant de chaleur qui soit précisément l’équivalent du travail accompli. La capacité calorifique à volume constant et la capacité calorifique à pression constante diffèrent donc d’une façon notable. Pour l’air, elles sont dans le rapport de 1 à 1,421. La différence de ces deux quantités représente ce qu’on appelait autrefois la chaleur latente de dilatation, et ce qui est pour nous l’équivalent exact du travail que l’air doit produire pour se dilater. Nous pouvons même noter que c’est à cette dilatation de l’air, dont les conditions numériques sont depuis longtemps fixées, que le docteur Mayer demandait dès 1842 une première détermination de l’équivalent mécanique de la chaleur. Le nombre que M. Mayer déduisit de cette donnée ne diffère pas sensiblement de celui qui a été adopté définitivement à la suite d’expériences de toute sorte.

L’air, avons-nous dit, produit un travail extérieur en se dilatant, c’est le cas ordinaire ; mais il peut, dans des circonstances spéciales, se dilater sans avoir de travail à produire. Or c’est le travail qui absorbe de la chaleur, et non point la dilatation elle-même ; s’il n’y a point de travail dans la dilatation, elle n’est signalée par aucune absorption de chaleur. Ce phénomène a surtout été mis en évidence par une expérience célèbre que M. Joule fit en 1845. M. Joule prenait deux récipiens égaux réunis par un tube à robinet ; dans l’un, il avait mis de l’air comprimé à vingt-deux atmosphères ; dans l’autre, il avait fait le vide. Ouvrant alors le robinet de communication, il laissait le gaz comprimé se répandre du premier récipient, dans le second, et le système arrivait bientôt à un état d’équilibre sous une pression uniforme de onze atmosphères. Pour arriver à cet