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objets en pierre dénotant le travail le plus grossier et l’état social le plus rudimentaire dans des dépôts lacustres, dans les sables et les graviers fluviatiles de Hoxne (Suffolk) et de diverses localités du Bedfordshire, dans des dépôts de transport sableux et caillouteux des vallées de la Somme et de l’Oise, dans les sablières du Champ de Mars, à Paris. Tout donne à penser qu’à l’époque à laquelle nous reportent ces fossiles, les îles britanniques étaient rattachées au continent. L’extrême analogie de la faune quaternaire de l’Europe orientale, sur les confins de l’Asie, avec celle de l’Europe occidentale fait supposer qu’on retrouvera là aussi de nombreux indices de l’ancienne existence de l’homme.

M. Garrigou rapporte au même âge les cavernes des Pyrénées, qui sont situées de 250 mètres à 150 mètres au moins au-dessus du niveau des vallées actuelles, et la plupart des cavernes du Périgord. La grotte de Moustier entre toutes est celle dont les silex ont offert le plus de ressemblance avec ceux de Saint-Acheul, sauf une catégorie spéciale d’un type tout à fait à part. Et ce qui semble indiquer que cette caverne appartient à l’époque la plus reculée, c’est que d’un côté on n’y a trouvé aucun os travaillé ou ciselé, que de l’autre les restes de renne y sont peu abondans, tandis que la découverte d’une mâchoire d’hyène y a révélé la présence de ce carnassier.

Les armes et les ustensiles de cette première époque sont des haches lancéolées, taillées à grands éclats, ainsi que l’a noté M. G. de Mortillet, qui a insisté plus qu’un autre sur l’importance du mode de la taille de la pierre pour apprécier l’âge comparatif des dépôts. On reconnaît aisément que ces silex, dont la patine blanchâtre dénote l’excessive antiquité, furent destinés à trancher, à fendre et à percer. Quand les pointes sont aiguës, elles ont été obtenues par des cassures à plus petits éclats ; quelques-unes de ces pierres figurent de véritables grattoirs.

Le second âge s’annonce par un travail plus intelligent de la pierre ; mais des caractères zoologiques tranchés ne le distinguent pas du premier. Les débris appartenant à cette époque se trouvent surtout dans les cavernes, et, suivant M. Garrigou, dans celles des Pyrénées qui sont creusées au pied des montagnes. Pendant cet âge, les carnassiers paraissent avoir été moins répandus[1], ce qui explique la multiplication des ruminans. Les grands pachydermes vivent encore ; le renne abonde dans le midi de la France,

  1. Disons pourtant qu’on a retiré de la grotte des Eyzies un os métacarpien du petit doigt d’un jeune felis de très grande taille présentant des traces nombreuses de rayures et d’entailles absolument semblables à celles que portent les os des animaux brisés et taillés par l’homme.