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fusion s’opéra sous le patronage de l’administration municipale, et il n’y eut plus que des omnibus. Un décret du 22 février 1855 reconnaît à la société formée pour cette exploitation le monopole exclusif du transport en commun dans Paris.

En 1855, l’entreprise avait dans Paris 347 voitures, qui ont transporté 36,000,000 de voyageurs ; en 1866, elle en a 664[1], qui en ont transporté 107,212,074. Si à cette circulation exclusivement parisienne on ajoute celle de la banlieue (3,430,252) et celle des omnibus sur rails (1,401,474), on arrive au total énorme de 111,743,800 voyageurs pour une seule année. Ce chiffre, mieux que toutes les démonstrations, prouve l’importance réellement générale d’un pareil service. S’il venait à manquer tout à coup, ce serait un désastre, et le Parisien ne saurait plus que devenir. En effet, quel chemin resterait chaque jour à parcourir, si l’on n’avait plus ces larges voitures hospitalières qui font, dans notre capitale, un trajet annuel de 21,971,928 kilomètres ! Quant au bénéfice que la compagnie retire d’un tel transport, il semble assez minime : 1 centime 28/100 par voyageur en 1866.

Depuis l’installation de 1828, les omnibus ont reçu des améliorations notables et dont il faut parler : les voitures sont plus commodes, les chevaux sont meilleurs, les conducteurs plus polis. Ceci n’est point douteux et a été remarqué par tout le monde ; mais les besoins du public ont été mieux servis, grâce à deux mesures dues à l’initiative de M. Moreau-Chaslon, qui, dès 1830, a pris la direction de l’entreprise et l’a toujours conduite avec un esprit pratique très remarquable. Dans le principe, les lignes étaient fort courtes et par conséquent fort chères. Ainsi celle des boulevards était divisée en deux ; de la Madeleine à la porte Saint-Martin, de la porte Saint-Martin à la Bastille. Aujourd’hui ces deux points extrêmes sont réunis par un seul et même trajet ; mais cela ne parut pas suffisant, et on établit les correspondances, c’est-à-dire que pour le prix de la place une fois payé, on a le droit de prendre deux voitures, de faire deux courses et de passer d’une ligne sur une autre, C’est ainsi que pour se rendre de Bercy à la porte Maillot, il n’en coûte que 30 centimes[2] ; il est difficile de franchir de telles

  1. Dans ce nombre, je ne compte pas les 100 voitures nouvelles que l’entreprise générale met en circulation pendant l’exposition universelle, ni les 58 omnibus qui font le service de la banlieue, ni les 10 (à 50 places) qui vont, sur la voie ferrée, de la place de la Concorde à Boulogne et à Sèvres, en suivant les quais, ni les 11 omnibus de la poste aux lettres, ni les 196 omnibus, grands et petits, appartenant aux chemins de fer. Sur ces derniers, 37, acquittant la taxe municipale, peuvent stationner sur la voie publique. Paris est donc journellement parcouru par 1,139 omnibus.
  2. Les militaires paient demi-place dans l’intérieur et place entière sur l’impériale.