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des fiacres. Les registres de la préfecture de police en font foi ; les plaintes portées contre les cochers et les conducteurs d’omnibus sont rares en regard de celles qui atteignent les cochers de voitures à la course. Sur soixante réclamations adressées contre les omnibus, il y en a environ cinquante-sept qui frappent les cochers, auxquels on reproche de ne pas s’être arrêtés au signal qu’on leur faisait, d’avoir été grossiers, d’avoir menacé quelqu’un à l’aide du fouet ; les trois autres ont pour objet les conducteurs, qu’on accuse parfois d’un excès de vivacité dans le langage ou d’un peu trop de galanterie dans les gestes. Ce ne sont là que des peccadilles, et, sauf de rares exceptions, tout ce personnel, qui a été sévèrement choisi, se conduit avec assez de régularité. L’entreprise générale surveille ses agens avec beaucoup d’activité ; elle sait que l’homme est essentiellement faillible, et elle lui impose une série de mesures préservatrices qui force sa probité à ne jamais dévier. C’est surtout à l’égard des conducteurs, qui chaque jour ont en main une recette moyenne de 83 fr. 04 c, que les précautions sont accumulées. A chaque voyageur montant en omnibus, le conducteur doit sonner un des deux cadrans qui indiquent le nombre de places occupées dans l’intérieur ou sur l’impériale ; toutes les fois qu’il s’arrête à l’une des cent vingt stations de l’entreprise, il doit faire viser sa feuille par le contrôleur, qui constate d’un coup d’œil le nombre de personnes présentes dans la voiture[1]. De plus, il existe une inspection secrète dont j’ignore le mécanisme ; mais je crois que ce personnel occulte est nombreux, car il a coûté 42,732 fr. en 1866. On peut donc affirmer que, contrairement à la Compagnie générale des voitures de Paris, l’entreprise des omnibus est très peu volée.

  1. La feuille des conducteurs est curieuse et mérite une rapide description. Elle est imprimée et porte : l’indication de la ligne, le nom du dépôt, la date du service, le numéro de la voiture, le nom du conducteur, celui du cocher. Le recto est divisé en colonnes verticales, heures de départ, heures d’arrivée, durée du parcours, numéro des courses. Une division horizontale correspondant aux numéros des courses et portant des chiffres depuis 1 jusqu’à 40 est intitulée visa des voyageurs d’intérieur ; plus loin, avec la même répétition : visa des voyageurs d’impériale. Le verso est consacré aux correspondances d’intérieur, correspondances d’impériale, voyageurs montés sur l’impériale pendant le trajet, ou vice versa, militaires montés dans l’intérieur. Chaque division est suivie d’une colonne réservée au total particulier. Une dernière colonne, désignée sous le nom de récapitulation, indique le nombre de voyageurs transportés, les sommes reçues dans la journée, et les observations. J’ai sous les yeux la feuille de travail du 6 juillet 1866, ligne de la Madeleine à la Bastille ; l’omnibus a fait vingt voyages ; la moyenne de la durée des courses a été de 30 minutes, il y a eu 474 voyageurs, et la recette a été de 105 fr. 45 centimes. la feuille porte 138 poinçons de visa et 145 chiffres, écrits à la main par les contrôleurs de station, ce qui donne un peu plus de 10 contrôles par voyage. Toute précaution semble donc prise pour éviter les fraudes et les détournemens.