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LA
RUSSIE ET L'ANGLETERRE
DANS L'ASIE CENTRALE

LES RUSSES EN BOUKHARIE.

Les graves événemens survenus en l’Europe depuis un an n’ont pas absorbé l’attention générale au point de laisser passer inaperçus les faits qui viennent de s’accomplir dans l’Asie centrale, et qui ont si profondément modifié les conditions politiques de cette partie de l’Orient. Déjà il y a près de trente ans une situation analogue avait répandu dans l’Inde une panique qui poussa les Anglais, désireux de neutraliser les progrès de la Russie, à entreprendre cette expédition de l’Afghanistan qui fut aussi désastreuse dans-ses résultats qu’elle avait été impolitique et étourdie dans sa conception. Aujourd’hui, s’il faut s’en rapporter au ton général, de la presse anglo-indienne, la marche des armées russes sur l’Oxus et leur présence à cent cinquante lieues des frontières de l’Inde ne préoccupent que médiocrement l’Angleterre, peut-être même la préoccupent-elles moins que nous[1]. Sans rechercher la raison de ce

  1. Dans une étude récente et curieuse à plus d’un titre, M. E. Jonveaux s’est fait dans la Revue (livraison du 15 février 1867) l’organe de l’opinion qui parait dominer en France au sujet des empiétemens des Russes dans l’Asie centrale. Un séjour de quelques semaines, que l’auteur du présent travail a fait, il y a moins de dix mois, sur la frontière même du pays menacé par les armes russes l’a confirmé dans des appréciations un peu différentes, et qui peuvent intéresser le public à un débat qui ne sera pas clos de longtemps.