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l’indice d’une combinaison à trouver. Si le gaz ne s’y prête pas, on peut la chercher ailleurs, dans l’électricité, dans l’éther, dans l’air comprimé, qui a réussi pour la transmission des dépêches télégraphiques entre la Bourse et le Grand-Hôtel. La vapeur vaudrait mieux sans doute et d’autant mieux qu’on l’emploierait plus en grand : le coût de l’unité de force est en raison des dimensions de l’appareil, et varie de 67 centimes à 6 centimes par force de cheval et par heure ; mais comment en rendre l’application possible à ces ateliers disséminés de maison en maison, et même d’étage en étage ? Il existe, il est vrai, dans quelques centres d’industrie, des appareils communs à plusieurs établissemens et dans lesquels on vend ou loue la force comme on loue ou vend un produit. C’est l’affaire de quelques courroies de transmission pour régler le débit dans un rayon déterminé. Des imitations sur une large échelle sont-elles possibles ? — Un grand manufacturier de Mulhouse, M. Jean Dollfus, en est convaincu et en fait l’objet d’une expérience. Il se propose de distribuer la vapeur à un certain nombre de maisons d’ouvriers pour rendre à la main-d’œuvre domestique une partie des chances qu’elle avait perdues. Dût-on échouer, l’entreprise est digne d’applaudissement. Pour nos faubourgs, est-il permis d’y songer ? Évidemment non. Voit-on d’ici de grandes courroies traversant les rues par des voies aériennes, et s’introduisant comme des polypes dans les logemens pour y exercer leur puissance brutale ! Deux accidens survenus coup sur coup au Champ de Mars prouvent quels dangers présente la cohabitation avec de pareils hôtes ; y échappât-on, le ménage n’en serait pas moins perpétuellement sur ses gardes. Ce danger ne serait pas moindre dans une canalisation souterraine de la vapeur ; toujours il y aurait un moment où la force se mettrait à découvert, et un risque de plus, celui des explosions, s’ajouterait à celui des accidens dus à l’imprudence. Le siège naturel de la vapeur est donc l’atelier commun de tous les degrés ; pour des travaux à domicile, il faut une force plus facile à discipliner.

Que dire du matériel destiné aux arts textiles ? A traiter le sujet suivant son importance, il y aurait des chapitres à écrire. Un professeur du Conservatoire, M. Alcan, qui l’a bien étudié, évalue à près, de 1 milliard 200 millions la somme que représentent, pour la France seulement, les matières employées par les industries du coton, de la laine, du lin et de la soie. Qu’on y joigne la main-d’œuvre, dont la proportion flotte entre le tiers et la moitié du coût des matières, les bénéfices successifs du fabricant et des intermédiaires, on aura une valeur qu’on peut, par approximation, porter à seize cents millions. Où en est la mécanique appliquée à ces