faut alors retarder les exploitations jusqu’au milieu de l’été, et comme le moment où l’écorçage est possible est très court, les ouvriers en profitent pour exiger des salaires très élevés. Ces difficultés, jointes au tort que le passage des voitures dans les coupes fait aux jeunes bois, empêchent souvent les propriétaires d’écorcer leurs taillis et les font renoncer à un bénéfice qui pourrait s’élever à 200 francs par hectare, si cette opération était rendue moins onéreuse. L’administration forestière ne l’autorise qu’exceptionnellement dans les forêts de l’état, dont la gestion lui est confiée. Cependant les tanneurs n’ont cessé de se plaindre de l’insuffisance des écorces mises à leur disposition. A une certaine époque, ils avaient même demandé qu’on usât de contrainte envers les propriétaires ; plus tard ils ont réclamé et obtenu la prohibition partielle de l’exportation des écorces, afin d’accaparer toute la production nationale. Ils ne s’en trouvèrent pas mieux, car l’avilissement des prix, résultat inévitable de cette mesure, éloigna du marché les vendeurs ; aussi a-t-on pu, en 1860, décréter la libre sortie de cette marchandise sans nuire à la consommation intérieure. On évalue à 101 millions de kilogrammes la quantité de peaux qui entrent annuellement dans les tanneries françaises ; il faut donc, à raison de 3 kilogrammes de tan par kilogramme de peau, environ 303 millions de kilogrammes d’écorce. Notre exportation annuelle étant de 10 millions de kilogrammes, on arrive à un total de 313 millions de kilogrammes d’écorce, qui représente la production de près de 90,000 hectares de forêts : grand commerce, on le voit, et cependant assez peu profitable à la propriété dans les conditions où se pratique actuellement l’écorçage. C’est pour parer aux inconvéniens jusqu’ici inhérens à cette opération que M. Maître a imaginé une machine au moyen de laquelle on pourrait l’effectuer en tout temps. C’est une simple chaudière d’où s’échappent des tubes qui conduisent la vapeur dans des récipiens en forme de tonneaux ou de caisses hermétiquement fermées contenant les bûches à écorcer. Au bout d’une demi-heure environ, l’écorce de ces bûches se gonfle sous l’action de la vapeur, et se détache du bois avec la plus grande facilité. Si ce procédé confirme les espérances de l’inventeur, il deviendra possible d’exploiter les coupes à l’époque normale, c’est-à-dire pendant l’hiver, de conduire les bois abattus soit sur les ports, soit dans les chantiers et de les écorcer ensuite quand on voudra. C’est même de cette façon que la machine est appelée à rendre le plus de services, car elle nous paraît d’un maniement trop difficile pour être employée en forêt et mise en œuvre dans les coupes.
Les scieries forestières, dont l’administration a exposé des