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cipales provient de ce que, les magistratures étant ordinairement gratuites, un seul magistrat était pensionné dans le conseil de la ville pour diriger la marche des affaires, aplanir les difficultés juridiques, veiller au maintien des franchises et privilèges. Deux ans après, la ville de Dordrecht, vieille cité hollandaise et qui passait pour supérieure en importance au chef-lieu de la Zélande, l’appela dans ses murs pour l’investir des mêmes fonctions. C’était un avancement. Cependant Cats tenait fort à sa chère Zélande, et ne se souciait pas trop d’accepter. Beaucoup d’amis lâchaient aussi de le retenir à Middelbourg; mais il paraît que plusieurs pasteurs de cette ville réussirent à lui faire voir une sorte de prédestination dans cet appel de la bourgeoisie de Dordrecht, et il se rendit. J’ai en vain tâché de savoir quel motif avait pu pousser les dignes ministres à éloigner Cats de leur voisinage immédiat. Cats, nous l’avons dit, était zélé protestant et très attaché à l’orthodoxie dominante. Il avait chanté en vers le synode de Dordrecht, et il était membre du consistoire de Middelbourg. Je ne serais pas surpris toutefois si l’explication de ce fait bizarre se trouvait dans le caractère éminemment conciliant, modéré, très prudent du digne pensionnaire. Il est à croire qu’il cherchait tout au moins à ne rien ajouter aux mesures intolérantes prises ou réclamées par le parti calviniste, rigide contre les arminiens ou remonstrans, les vaincus de Dordrecht. Je trouve dans un travail minutieux de M. Nagtglas sur l’histoire intérieure du consistoire réformé de Middelbourg que Cats a gardé le plus souvent un silence étonnant chez un homme doué d’une telle faconde dans les délibérations de la vénérable compagnie. Son nom en effet se trouve mentionné très rarement dans les actes. Il est donc à présumer que d’un certain côté on ne tenait pas précisément à conserver un ancien aussi influent et aussi enclin au modérantisme. Rappelons à ce sujet que la querelle des gomaristes ou calvinistes rigides et des arminiens ne fut pas seulement religieuse. La politique y joua un grand rôle, et la querelle théologique recouvrit en partie le conflit déjà grandissant entre le parti populaire orangiste et l’aristocratie bourgeoise.

A Dordrecht, Cats continua de s’occuper de littérature. Il fonda dans cette ville une école de poésie qui ne fut pas sans éclat. C’est là aussi qu’il composa son Anneau nuptial, autre poème historique et moral dont le mariage est encore le sujet. En 1627, il fut envoyé par les états en Angleterre avec un certain Joachimi pour réclamer auprès de Charles Ier en faveur des armateurs hollandais, dont les corsaires anglais, sous prétexte de courir sus à la marine française, avaient capturé les navires. Cats fit de son mieux, reçut du roi d’Angleterre la croix de Saint-George, mais n’obtint pas grand’--