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réussi, fut imitée par les propriétaires voisins, et de proche en proche cette culture gagna tout le département de Vaucluse, pendant que M. Martin de Montagnac l’importait dans celui des Basses-Alpes, où elle ne reçut pas un moins bon accueil. Cette industrie a pris récemment près de Loudun une extension considérable.

La première chose à faire quand on veut se livrer à une exploitation de ce genre est de déterminer l’espèce de chêne la plus favorable. Il y faut de la sagacité, du coup d’œil et surtout du bonheur. On recherche donc quelles essences, dans des conditions climatériques et avec des natures de terrain analogues à celles dont on dispose, ont semblé fournir les plus grandes quantités de truffes. M. Martin de Montagnac, pour sa localité, a donné la préférence à des chênes à fleurs caduques ; M. Rousseau, expérimentant sur un autre point, a mieux aimé planter des chênes yeuses, et il y a joint, pour se rapprocher des conditions observées dans des truffières très abondantes, des chênes rouvres, quelques pins d’Alep, avec une bordure de chênes kermès. D’autres propriétaires s’adressèrent à des espèces différentes sans pouvoir toujours donner des raisons bien concluantes pour défendre leur choix. Quoi qu’il en soit, quand l’espèce a été choisie, il s’agit de se procurer des glands d’arbres au pied desquels se trouvent déjà des truffières. Si dans ces truffières il y a des chênes sous lesquels les truffes contractent une odeur musquée et fétide, il faudra éviter avec soin d’en recueillir les glands : la truffière nouvelle risquerait d’être envahie par des espèces de truffes atteintes du même défaut. Les glands, à peine récoltés, sont disposés dans des tonneaux par couches régulières superposées alternant avec des couches de sable fin. Ils doivent être semés dès les premiers jours de printemps. Le semis s’effectue en lignes régulières orientées du nord au sud, chaque gland étant à 40 ou 50 centimètres du gland voisin et chaque rangée étant séparée de la suivante par un intervalle de 5 ou 6 mètres. On se réserve ainsi la facilité de pratiquer plus tard dans le taillis déjà grand des éclaircies régulières. Quand les arbres auront douze ans, il faudra dans chaque rangée en couper un sur deux, de manière à porter à 1 mètre la distance entre ceux qui resteront ; quand ils auront vingt ans, cette distance devra être portée à 2 mètres, et à 4 quand ils seront tout à fait grands. Pendant les cinq ou six premières années, il faudra faire deux labours par an, au printemps et à l’automne. Dès que les truffes auront commencé à paraître, et c’est généralement au bout de ce temps qu’elles se montrent pour la première fois, on ne devra plus donner qu’un labour très léger au printemps. Le labour d’automne, dérangeant les végétaux souterrains, risquerait de détruire promptement la truffière. Dans le Périgord et le Poitou, le labourage du printemps est même