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commandemens formels émanés des révélations divines. L’ancienne loi elle-même était bien loin de la perfection de la loi nouvelle, qui détermine nos devoirs en vue des prescriptions de l’Évangile et des assurances de la vie future. Il faut remarquer aussi, ajoutait-il, que Job ne tomba dans le découragement que lorsque Satan eut obtenu le pouvoir d’affaiblir son corps par la maladie et de briser sa volonté en épuisant ses forces. Jusqu’alors Job avait résisté à tous les fléaux dont Satan l’avait accablé : la perte de ses biens, l’incendie de ses récoltes et de ses maisons, la dispersion de ses troupeaux et de ses serviteurs, la trahison de ses proches, la mort de tous ses enfans écrasés ensemble dans un festin et expirant au milieu du vin et des coupes, sans qu’il lui en restât un seul pour l’aider à pleurer, il avait accepté tout cela avec fermeté, avec actions de grâces envers Dieu, qui lui envoyait ces épreuves. Il était Job alors. Job tout entier ; mais plus tard, quand la maladie l’attaqua, que les ulcères rongèrent son corps, qu’une longue suite de maux lui eurent enlevé la force de supporter la douleur, son courage défaillit, et il désira la mort. Ce dernier combat de l’homme contre lui-même ne fut que la suprême et dangereuse tentation que lui réservait l’esprit du mal, et cependant Job y résista ; Job reprit possession de son âme, et l’esprit du mal n’eut plus rien à imaginer pour essayer de vaincre ce juste. Les développemens que l’auteur donne à son idée, le tableau de ces fils à qui le père ne put rendre les devoirs suprêmes, et qui descendirent dans le tombeau pêle-mêle avec les débris du repas qui les avait réunis, ce morceau peut être considéré comme un des plus beaux sortis de la plume de Chrysostome.

C’est donc à l’Évangile qu’Olympias doit s’adresser pour y trouver des exemples et un guide, quand ces abominables pensées viennent l’assiéger. Le maître a dit : « Si votre justice n’est pas plus abondante que celle des scribes et des pharisiens, vous n’entrerez pas dans le royaume des cieux. » Souhaiter la mort est maintenant une chose condamnable, car il y a des couronnes tressées pour toutes les amertumes. Saint Paul aussi, ce grand apôtre, avait repoussé loin de lui le désir de mourir. « Voir tomber mes chaînes pour être avec le Christ, ce serait, avait-il dit, bien préférable pour moi ; mais il est plus nécessaire, à cause de mes frères, que je reste emprisonné dans ce corps. » Lui-même avait éprouvé tout ce que les souffrances corporelles ont de plus poignant ; trois fois il avait supplié le Seigneur de l’en délivrer, et, ne l’ayant point obtenu, il avait accepté ses maux avec calme et bonheur, comme une épreuve. « Croyez-le bien, Olympias, on a beaucoup de mérite à supporter dans sa maison, cloué dans son lit, les aiguillons de la maladie, pourvu qu’on le fasse avec résignation. Le seul mérite d’un chrétien n’est pas de