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que les évêques de Fulda, qui craignent à juste titre que le concile me fasse de nouveaux dogmes, qu’il ne condamne la société moderne, et qu’il n’ait pas la liberté suffisante, ne se font pas faute de dire dans leur adresse : « Jamais un concile œcuménique ne pourrait formuler un nouveau dogme qui ne serait pas contenu dans la sainte Écriture et dans la tradition apostolique. Jamais un concile œcuménique ne pourrait formuler des maximes qui seraient en opposition avec la justice et le droit de l’état, avec les vrais intérêts de la science et de la liberté légitime. Rien n’est moins fondé que la crainte que le concile manque de la liberté nécessaire à ses délibérations. » Pour des lecteurs de la Civiltà cattolica, le tour est ingénieux ; mais, quelque habile et révérencieuse que soit l’adresse de Fulda, le sens en est clair : elle prend nettement parti contre l’ultramontanisme et son programme.

L’église catholique hongroise a conservé un esprit très libéral. Elle est plus décidée qu’aucune autre à repousser les prétentions de la curie. Qu’on en juge par le ferme langage que tenait cet été l’un de ses membres les plus distingués à un congrès catholique réuni à Pesth :


« Le monde catholique est à la veille de grands événemens. Ne dissimulons rien et disons ouvertement ce que chacun sait. Le monde catholique est divisé en deux grands partis : l’un, libéral, qui veut marcher d’accord avec l’état moderne, — l’autre ultramontain, qui a horreur de la liberté de penser la plus timide. J’ai l’intime conviction que les représentans catholiques hongrois réunis dans cette assemblée, animés par la foi religieuse et l’amour de la patrie, n’oubliant pas que leurs travaux intéressent l’église et le pays, — que l’histoire les jugera un jour, se prononceront sans hésiter en faveur des idées catholiques libérales.

« L’Évangile n’est nullement ennemi du libéralisme ; bien plus, comme source de l’amour éternel, comme rayon de la lumière divine, il est le libéralisme même. Le congrès, je l’espère, exprimera hardiment et nettement cette idée, et ses membres, par tous leurs actes, prouveront qu’ils entendent servir l’église et la patrie en la popularisant. Aucun d’eux ne voudra soutenir le parti qui, cherchant à s’identifier avec l’église, s’efforce de prouver que celle-ci est l’ennemie jurée de l’état moderne et conduit ainsi le catholicisme à sa perte. »


Dans le tableau tracé, dit-on, pour le saint-père, afin qu’il puisse d’un coup d’œil se faire une idée de l’esprit des diverses églises, le Portugal est mis à côté de la Hongrie comme appartenant au parti de la résistance libérale. Nous ne savons pas bien quelle place y occupe la France. Si l’on compte les suffrages, elle doit être