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Page:Revue des Deux Mondes - 1870 - tome 86.djvu/221

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voyons-nous pas les plus intelligens, les mieux doués sous tous les rapports, venir au monde dans un état de faiblesse extrême, qui impose aux parens, et surtout aux mères, le devoir de garder et de protéger longtemps leurs enfans ? L’homme en est le premier et le plus grand exemple. Parmi les oiseaux, il y a une distinction plus tranchée que chez les mammifères, qui tous, sans exception, tirent leur premier aliment de leurs mères. Les poussins, au sortir de la coquille, sont déjà robustes et habiles à se nourrir par eux-mêmes : à la vérité, ils suivent leur mère et semblent réclamer sa protection ; mais,. s’ils l’accompagnent et se réfugient sous son ventre, c’est uniquement pour trouver la chaleur essentielle aux nouveau-nés de tous les animaux à sang chaud. William Edwards, le célèbre physiologiste, montra, il y a près d’un demi-siècle, que chez les nouveau-nés la faculté productrice de chaleur est rarement assez développée pour que la température de l’organisme puisse se maintenir au degré normal, si l’atmosphère se refroidit beaucoup. Les observations et les expériences des naturalistes prouvaient que les jeunes animaux doivent être tenus chaudement, et qu’à cet égard l’instinct des mères n’est jamais en défaut. MM. Villermé et Milne Edwards reconnurent, par un ensemble de faits bien constatés, que l’espèce humaine n’est pas soustraite à la loi générale, et de la sorte ils furent conduits à s’élever contre l’obligation barbare de transporter aux mairies les enfans nouveau-nés, qui courent en effet un danger de mort, si le froid vient à les saisir. On s’appuyait, pour montrer le péril, sur des données scientifiques irrécusables ; néanmoins il a fallu à quelques esprits d’élite quarante ans d’une persévérance à toute épreuve pour triompher de la routine administrative et obtenir à Paris l’abandon d’une pareille pratique.

Si, au sortir de l’œuf, les petits de la poule et de la cane, oiseaux d’une intelligence très bornée, n’ont besoin de leur mère que pour se réchauffer près d’elle, au contraire tous ces gentils oiseaux qui nous ravissent par leur chant, par leur industrie, par leurs amours, par leur intelligence, à nos yeux d’autant plus merveilleuse que la créature est plus mignonne, tous ceux que l’on habitue à vivre de notre vie domestique et qui répètent les paroles humaines, enfin ces fiers oiseaux comme l’aigle et le faucon sont dans l’obligation de veiller longtemps sur leurs petits. Après la naissance, ceux-ci sont condamnés à demeurer au nid des semaines ou des mois, et à tout attendre de leurs parens. Quels parens que les hardis moineaux, que les fauvettes et les rossignols au pur gazouillement, que les perroquets au bruyant ramage, que les faucons au cri strident ! Habiles à construire des nids moelleux, pleins de ressources pour en réunir les matériaux, ils se soumettent aux plus pénibles fatigues afin de veiller sur leur progéniture, afin de la défendre contre